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Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 30.djvu/690

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Euphronios a fait ce chef-d’œuvre d’argile
Qu’il signa de sa pointe illustre, le jugeant
D’autant plus précieux qu’il le fit plus fragile.

Juillet 1901.



LA FILEUSE


Elle est morte Platthis, morte la bonne vieille
Qui, tout le long des jours anciens et des nouveaux
A filé, dévidé, roulé les écheveaux
De laine blanche dont débordait sa corbeille.

Si parfois s’inclinait la tête qui sommeille,
Les doigts de la fileuse actifs et sans rivaux
D’un geste inconscient poursuivaient leurs travaux ;
Seule la Mort a pu mettre un terme à sa veille.

A peine fut trouvée en son pauvre taudis
L’obole qui, glissée aux doigts enfin roidis,
Paya le dur nocher de la dernière barque ;

Et Platthis a franchi le fleuve aux sombres eaux,
Curieuse de voir si, mieux qu’elle, la Parque
Savait tordre le fil et tourner les fuseaux.



LES FLEUVES D’OMBRE


… Et quos fumantia torquens
Aequora, gurgitibus PhlegEthon perlustrat anhelis.
C. CLAUDIANI de raptu Proserpinae.


Ce n’est pas, tel qu’Orphée, en héros de l’Amour
Que j’ai, bravant l’Erèbe et devançant la Moire,
Sans obole, passé le fleuve sans mémoire
Dont l’onde bat sans bruit la rive sans retour.