Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 30.djvu/874

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ecclésiastiques attachés à cette église. Aussi les curés demandaient-ils à leur remplaçant le versement d’une pension. Ces pensions donnèrent lieu à de telles enchères, à de si scandaleux marchandages, que les malheureux suppléans étaient souvent réduits à ce qu’on appela la portion congrue, et que les canonistes n’avaient pas de termes assez violens pour flétrir cet usage.

Les conciles et les Parlemens furent longtemps impuissans à déraciner une telle pratique. Il fallut l’autorité d’un Louis XIV pour mettre de l’ordre dans la question des pensions ecclésiastiques. Par sa loi générale, enregistrée au Parlement le 21 juin 1671 ; puis, par une déclaration du 9 décembre 1673, enregistrée au Parlement le 5 février 1674, Louis XIV réglementa définitivement ces pensions.

« Ces deux règlemens, — écrit M. Durand de Maillane en 1770, — ont toujours été exécutés. » Ils n’en donnèrent pas moins lieu à de multiples chicanes et applications de jurisprudence qui cessèrent naturellement avec leur cause, c’est-à-dire par la confiscation de tous les biens ecclésiastiques au profit de la nation, par le décret des 2-3 novembre 1789.


Ces pensions accordées sur les revenus des églises, malgré leurs imperfections, n’en étaient pas moins, fréquemment, pour les bénéficiaires de véritables retraites. Quant aux desservans, qui exerçaient d’une façon effective le ministère sacré, ils trouvaient, dans la plupart des cas, les ressources nécessaires à leur existence dans les revenus de leur église. L’État n’avait donc pas à se préoccuper à cette époque des prêtres âgés et infirmes.

La situation du clergé devint tout autre après la confiscation.

De nos jours, comme en 1789, la guerre contre l’Eglise catholique française se dissimule sous la pression de la politique ou la justification hypocrite d’une lutte philosophique. La mainmise sur les biens ecclésiastiques et, actuellement, l’extinction brutale d’une dette solennellement consentie, en sont aussi un mobile que l’on ne cherche pas à dissimuler. Déjà, l’on suppute le produit d’une telle liquidation et l’emploi des quelque 42 millions du budget des cultes. Mais l’on se soucie assez peu du sort qui sera réservé, du fait de cette spoliation, aux prêtres qui ont voué leur existence au service de la religion et à ceux que l’âge et les infirmités guettent ou ont atteints.