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le conducteur de la danse aura seul à savoir cette chanson tout entière : les autres danseurs n’auront qu’à répéter après lui un ou deux vers plus ou moins traditionnels, et qui pouvaient s’insérer comme des passe-partout en nombre de chansons. Celles-ci sont donc composées en règle d’une partie qui se renouvelle, confiée au principal danseur, et d’une partie fixe, qui sera reprise comme un refrain par le chœur. Telle est l’unique loi de ces chansons, et cette répartition dut à l’origine se contenter des formes strophiques les plus simples ; c’est peu à peu que se dégagea le type régulier des roondets de carole, tel qu’il se trouve dans cet exemple :


Le soliste : Par ci passe Robins li amorous :
Encor en est li herbages plus dous.
Le chœur : Main (a) se leva la bien faite Aelis.
Le soliste : Par ci passe li bruns, li biaus Robins.
Le chœur : Biau se para et plus biau se vesti.
Le soliste : Marchiez la foille et ge quieudrai la flor (b) ;
Par ci passe Robins li amorous :
Encor en est li herbages plus dous[1].


Telle est encore cette autre chanson de carole, reconstituée par M. A. Jeanroy[2] :


Le soliste : Vos ne vendrez (c) mie caroler es prez,
Que vos n’amez mie.
Le chœur (répète) : Vos ne vendrez mie caroler es prez,
Que vos n’amez mie.
Le soliste : C’est la jus (d), la jus qu’en dit en ces prez...
Le chœur : Vos ne vendrez mie caroler es prez.
Le soliste : La Bele Aelis i vet por joer
Souz la vert olive.
Le chœur : Vos ne vendrez mie caroler es prez,
Que vos n’amez mie.
Le soliste : La bele Aelis i vet por joer.
Le chœur : Vos ne vendrez mie caroler es prez.
Le soliste : G’i doi bien aler et bien caroler,
Car j’ai bele amie.
Le chœur : Vos ne vendrez mie caroler es prez.
Que vos n’amez mie.

(a) Matin. — (b) Foulez la feuille et je cueillerai la fleur. — (c) Viendrez. — (d) Là-bas.

  1. Recueil de motets français des XIIe et XIIIe siècles, publié par G. Raynaud, Paris, 1883, II, p. 131 ; comparez Guillaume de Dole, publié par G. Servois, v. 541.
  2. Origines de la poésie lyrique en France, p. 422.