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d’Auvergne, le comté d’Eu et nombre de fiefs en diverses provinces, rapportaient 1 700 000 francs, sous Louis XIII, et 2 millions sous Louis XIV.

D’autres obtenaient le même chiffre, mais par des sources moins assurées ; le maréchal d’Ancre, venu en France sans un sou vaillant, évaluait, en 1617, son avoir total à 44 millions de francs, ainsi détaillés : 6 250 000 francs d’offices, non compris celui de gouverneur de Normandie ; 6 250 000 francs du marquisat d’Ancre, joint à la terre de Lésigny, sa maison du faubourg Saint-Antoine et celle du Louvre ; 9 375 000 francs placés à Rome et à Florence, 5 millions d’autres placemens, 11 250 000 fr. que faisait valoir pour lui le fermier des gabelles et 6 250 000 francs de meubles, pierreries et argent comptant.

De toutes ces prises, rapidement faites, Concini ne jouit pas longtemps. Plus heureux que le fils du petit notaire florentin, le cadet de Gascogne Nogaret de La Valette conserva et accrut, sous les premiers Bourbons, ce qu’il avait acquis sous les derniers Valois et mourut duc d’Epernon, avec 1 700 000 francs de rentes. La moitié venait de ses dignités multiples, le reste de 23 terres titrées dont il était propriétaire : duchés d’Epernon (120 000 francs) et de La Valette (55 000 francs), baronnies de Lesparre (75 000 francs), de Castelnau et de Castillon, « captalat » ou principauté de Buch (20 000 francs), comtés de Foix, de Loches, de Gaumont, etc. Dans le chapitre des appointemens, les principaux étaient ceux de colonel général de l’infanterie (320 000 francs), les gouvernemens de Guyenne et autres (230 000 francs), ses pensions : comme officier de la couronne (50 000 francs), comme chevalier du Saint-Esprit (15 000 francs), comme conseiller d’État (10 000 francs) ; une gratification annuelle du fermier des gabelles (50 000 francs), etc. Les biens mobiliers ne consistaient qu’en 135 000 francs de rentes sur l’Hôtel de Ville de Paris et sur la recette générale de Rouen.

Mobilières au contraire, plutôt que foncières, étaient les fortunes de financiers, récemment édifiées, qui sont le trait caractéristique de l’époque. C’est la première fois que des particuliers amassent beaucoup d’argent autrement que par la force, la première fois qu’ils le conservent autrement qu’à main armée. Il est alors entrepris par l’État sur ses sujets une sorte d’expédition intérieure, non point belliqueuse, mais pécuniaire. Le gouvernement fonde le budget : il prend aux uns, demande aux autres