toujours temps, grâce au second procès, le procès politique, de condamner la Compagnie à des dommages-intérêts qui dépasseront le montant du rachat du câble. De toutes façons, la combinaison est ingénieuse et le bénéfice certain. Quant aux acheteurs des titres, ils ne feraient peut-être pas une très brillante spéculation, mais, en tout cas, les banques qui feraient le « lancement » et les intermédiaires chargés des négociations réaliseraient sans doute, eux, une très fructueuse opération.
Telle est la situation au printemps de 1905. Les chancelleries négocient sur la question des câbles et les agens secrets s’abouchent pour la réussite de la combinaison financière. L’intrigue qui déroule ses péripéties sur le théâtre est doublée par une autre qui se trame dans la coulisse ; plusieurs acteurs, changeant de masque selon qu’ils changent de scène, jouent en même temps un double personnage. Le 31 mars, le jugement de première instance est prononcé dans l’affaire des câbles ; le 4 août, malgré des essais de conciliation dont il serait fastidieux de raconter les péripéties, la Chambre de la Cour fédérale confirme le jugement : il prononce l’abrogation pure et simple du contrat qui donne à la Compagnie le monopole des communications télégraphiques entre le Venezuela et les États-Unis. Mais, malgré cette sentence en apparence définitive, une entente reste possible et on la croit probable ; le droit de faire atterrir les câbles sur le territoire vénézuélien n’est pas retiré à la Compagnie. Le gouvernement français fait savoir à Caracas que le concours de nos financiers dépendrait de l’arrangement de l’affaire des câbles ; le 16 août, le président Castro reçoit M. Taigny, chargé d’affaires de France, avec les marques d’une sincère confiance et s’engage vis-à-vis de lui à substituer à la sentence de la Cour un arrangement amiable. L’affaire financière, à Paris, paraît marcher à souhait ; on annonce le très prochain départ pour Caracas de trois délégués des banques, dont l’un réunit en sa personne la double qualité de représentant d’une grande société de crédit et d’administrateur de la Compagnie des câbles.
Soudain, coup de théâtre. Le 4 septembre, la Compagnie des câbles est mise en demeure de fermer son bureau de Caracas et tous ceux de la côte, à l’exception de celui de la Guayra, et de payer une surtaxe de un bolivar par mot sur tous les télégrammes transmis par ce dernier bureau : le caractère arbitraire d’un pareil acte était d’autant plus flagrant que le président