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Dès que les hommes veulent en effet utiliser les ressources et les richesses naturelles, ils doivent résoudre non seulement des problèmes techniques — cultures, mines, etc. — mais encore des problèmes de coordination et de subordination de leurs propres efforts ; des règles économiques et sociales s’établissent entre les uns et les autres avec plus ou moins de fixité. Le mode de propriété, propriété collective ou individuelle, nous offre un exemple typique des nombreux faits sociaux qui se relient, par une adaptation plus ou moins directe et heureuse, au travail même de l’exploitation de la terre.

Selon que les groupes humains sont placés dans tel ou tel cadre géographique, ils sont entraînés à faire des cultures, ici de palmiers, là de riz, là de blé ; ils sont entraînés à élever ici des chevaux et des jumens comme dans les steppes herbacées du centre de l’Asie, là des animaux de l’espèce bovine comme dans les montagnes de l’Europe centrale, là encore des moutons et des brebis comme sur les hauts plateaux secs de l’Ibérie ou de la Berbérie… Et ces divers modes d’activité comportent des combinaisons très diverses d’organisation sociale. La conception et les limites de la propriété ne sont pas les mêmes pour un cultivateur qui tous les ans refait ses sillons sur le même champ, et pour un pasteur qui promène de grands troupeaux de chevaux ou de chameaux à travers de très vastes espaces, à peu près vides de végétation arborescente et de population sédentaire.

Tous ces faits, nous pouvons les agglomérer sous le terme de « géographie sociale ; » mais il convient de ne jamais oublier que si ces faits très complexes sont en connexion avec le cadre géographique, ils dépendent surtout de la volonté et de la liberté humaines ; l’analyse, au point de vue géographique, en sera donc très délicate et requerra une prudence critique très avisée.


Enfin la coexistence de multiples groupes, ayant tous besoin et de se nourrir de la terre et d’occuper une parcelle du sol, crée forcément entre ces groupes des relations, tantôt pacifiques, tantôt violentes, dont quelques-unes se rattachent aussi à certains faits généraux ou locaux de nature géographique.

Encore plus avisée et plus prudente doit être la critique qui s’exerce sur cette quatrième et dernière série de faits de géographie humaine : la « géographie historique, » c’est-à-dire politique,