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nous serions très heureux de le reconnaître. » La Reine retint à dîner Mercier. Elle ne se montrait pas aussi attristée qu’on l’eût cru ; elle paraissait au contraire avoir l’esprit parfaitement libre et même enjoué, gracieuse pour tout le monde, et en particulier pour Gonzalès Bravo. Persuadée qu’elle n’avait plus rien à craindre, elle partit pour Lequietio, près Saint-Sébastien.

Le Duc de Montpensier avait été autorisé à choisir le lieu de son exil. Arrivé devant Lisbonne, il demanda au gouvernement portugais l’autorisation de descendre à terre. Les Portugais répondirent qu’il n’y avait aucune raison de lui refuser l’hospitalité, et les Espagnols ne firent aucune observation. A peine débarqué, il lança une protestation insolente qui contenait des accusations et non des explications comme les attendait Isabelle. Elle se terminait ainsi : « La mesure dictée par le gouvernement de Votre Majesté est une violation flagrante des lois fondamentales de l’État, aussi bien que des principes les plus immuables de justice, contre laquelle nous protestons énergiquement sans invoquer ni distinction de rang, ni lien de parenté… Nous venons seulement au nom de nos droits d’Espagnol en appeler, devant Votre Majesté, de l’acte de violence qui nous éloigne de notre chère Espagne ; en lui adressant ces protestations, nous espérons que la réparation sera aussi publique et aussi solennelle que l’injure » (3 août 1868).


IV

L’amiral Topete, aidé par le général Izquierdo, qu’on avait oublié comme lui dans le coup de filet du 7 juillet, recommence aussitôt à préparer la révolution, il ne cherche pas à agir à Madrid, dont le gouvernement paraît être le maître : c’est aux extrémités du pays, par l’escadre, qu’on engagera l’action. Topete détache un bateau à vapeur de son escadre vers les Canaries, pour ramener les généraux relégués qui, dès leur arrivée, prendront la tête du mouvement (8 septembre). Mais Prim ne veut pas être devancé : la révolution portera son nom et sera son œuvre. Il avait obtenu, à grand’peine de l’Empereur, par l’intermédiaire de La Valette, d’aller à Vichy soigner une grave maladie de foie. Il y arrivait à