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put vaincre (janvier 1869). « Si le Roi veut m’exiler, avait-il dit, qu’il me dise où je dois aller, mais je ne veux pas régner en Espagne. »

Il ne reste donc qu’à prendre Montpensier, » dirent Serrano et Topete. Prim, qui, dans toute cette crise, va se mouvoir toujours dans l’équivoque et la duplicité, parut y consentir. Il protesta que son cri : A basso los Borbones ! ne s’appliquait pas aux membres de la famille qui avaient réprouvé la politique de la dynastie déchue. On put croire alors que cette candidature allait devenir un fait accompli et Mercier envoya un avertissement alarmé. A quoi La Valette répondit : « Mon cher ambassadeur, vos dernières dépêches font prévoir le succès d’une candidature que tous les hommes placés à la tête des affaires semblaient avoir écartée. Si cette combinaison triomphait, nous pourrions, il est vrai, l’accepter sans difficulté, car nous avons déclaré, dès le début, que nous ne voulions en rien nous immiscer dans les affaires intérieures de l’Espagne. Mais il ne pourrait nous convenir de paraître vouloir l’approuver. Votre présence à Madrid serait certainement embarrassante pour vous comme pour nous dans un pareil moment. L’Empereur désire donc que vous évitiez de vous trouver dans une semblable position, et je suis chargé par Sa Majesté de vous inviter à chercher, dans vos affaires privées, un prétexte plausible pour vous rendre à Paris avant que l’éventualité dont il s’agit puisse se réaliser. Je ne saurais d’ailleurs vous indiquer l’instant précis où vous pourriez quitter Madrid ; j’en laisse le choix à votre propre appréciation, mais vous devez vous y préparer dès à présent, en prenant soin d’expliquer votre départ de manière qu’on ne puisse lui attribuer aucun motif politique. Sa Majesté attache beaucoup d’intérêt à ce que ses ordres à cet égard soient bien compris, et j’en recommande l’exécution à toute votre prudence » (16 février 1869)[1].

Mais Olozaga était là et ne voulait pas entendre parler de Montpensier. Il annonça que si Serrano et Prim persistaient à le proposer, il communiquerait des documens qui le rendraient à jamais

  1. Voilà réfutées, par La Valette lui-même, les paroles que Zorilla et Muniz lui ont attribuées sur l’intention de l’Empereur de repousser Montpensier. Ou on a mal compris ce qu’avait dit La Valette, ou celui-ci a parlé sans penser ce qu’il disait.