Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1906 - tome 35.djvu/180

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pas moins étudiés que les Allemands, l’idée d’Herbert Spencer, celle de l’Évolutionnisme.

La psychologie se rapproche alors non plus des mathématiques ou de la physique, mais des sciences naturelles. Car évolution implique continuité : « La vie du corps et la vie mentale sont des espèces dont la vie proprement dite est le genre. » Entre les faits physiologiques et les faits psychologiques, quelle démarcation précise tracer ? Pour Spencer, l’acte réflexe esquisse l’instinct, la mémoire, la volonté. Sous toutes ses formes, à tous ses degrés, la vie est un système de « correspondances, » une adaptation du dedans au dehors. L’être vivant, même doué de conscience, entretient des relations avec son milieu. Sa conscience reflète ces relations, rien de plus : elle les signifie et les figure dans un langage particulier. Elle est la face éclairée d’un phénomène dont l’autre plonge dans l’ombre. « Les changemens dans les cellules nerveuses sont les corrélatifs de ce que nous connaissons subjectivement comme des faits de conscience. » Les données psychologiques doivent être ainsi fournies surtout par l’histologie, l’anatomie descriptive, toute la physiologie. Car, comme le dit cet autre psychologue de l’École anglaise, Alexandre Bain : « Nous avons toutes raisons de croire que toutes nos actions mentales sont accompagnées d’une suite non interrompue d’actes matériels. Depuis l’entrée d’une sensation jusqu’à la production au dehors de l’action qui y répond, la série mentale n’est pas un instant séparée d’une série d’actions physiques. »

Donc, à la suite des Anglais, il s’agissait simplement d’appliquer la méthode scientifique, « des variations concomitantes » à deux ordres de phénomènes. Observons en même temps comment se modifie l’organisme, quand se modifie la conscience. Si nous parvenons à constater des successions régulières entre les changemens matériels et les changemens moraux, nous pourrons formuler comme une loi physio-psychologique la dépendance des uns par rapport aux autres.

Soit l’attention : on l’avait toujours considérée par la conscience seule. Elle apparaissait alors comme une sorte d’ « acte pur » de l’esprit, une opération de la pensée mystérieuse et insaisissable. En réalité, pour peu qu’on examine l’attention du dehors, on s’aperçoit qu’il n’en est rien. « L’attention, dit M. Ribot, n’est pas une activité indéterminée... Son mécanisme