Page:Revue des Deux Mondes - 1906 - tome 35.djvu/445

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la crue, et les eaux, inutiles, souvent dangereuses en ce moment, seraient ainsi refoulées dans les marais voisins. L’œuvre se compléterait par l’extraction des végétations marécageuses, les sadds, qui obstruent le Haut-Nil.


VII

Inutile d’ajouter que cette œuvre gigantesque, dont l’achèvement nécessiterait une dépense de 21 400 000 livres égyptiennes[1], n’est pas près d’être accomplie. Sir W. Garstin, après en avoir dressé le devis, ajoute que « le temps n’est pas encore venu d’exécuter la majeure partie d’un aussi vaste programme, » et que, même si l’on disposait de l’argent nécessaire, « une période de dix à quinze ans suffirait à peine, en supposant les circonstances les plus favorables[2]. » Il indique toutefois, par ordre d’importance, les projets suivans « comme plus urgens et susceptibles d’être poursuivis dans une période relativement courte... : » la surélévation du barrage d’Assouan, le remaniement des branches de Rosette et de Damiette, celui du Bahr-el-Gebel, l’élévation des canaux de la Basse et de la Haute-Egypte, un barrage sur le Nil entre Assiout et Keneh, un second sur le Nil Bleu et quelques autres travaux de moindre importance

Dans dix ans, la conversion de la dette égyptienne aura, si elle est alors pratiquement réalisable, fait bénéficier le Trésor khédivial de disponibilités qui permettront de mener à bonne fin au moins une partie de tout cela. En attendant, une expérience déjà suffisamment prolongée instruira l’Egypte sur les résultats de son nouveau système d’irrigation. Ce système et le régime qu’il impose à l’agriculture ont enrichi l’Egypte, cela est certain. Si le pays retirait normalement de sa terre, comme il le faisait, il y a trois quarts de siècle, une seule récolte de blé, de légumes ou de fourrage, il ne pourrait pas acquitter les arrérages de ses emprunts ni même importer, en échange de son coton, les produits manufacturés dont sa population ne saurait désormais se passer.

Reste à savoir si ces brillans résultats sont durables. Le fellah

  1. 13 millions pour le Soudan pour 1905 et 8 400 000 pour l’Egypte. Rapport Cromer pour 1905 et Garstin, Report upon the Basin of the Upper Nile. Appendice, I, p. 13.
  2. Garstin, Report, p. 12.