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ne sont représentées que par des agens. Leurs réclamations ne peuvent se faire jour jusque dans l’enceinte parlementaire. Les procédés dilatoires et les fins de non recevoir suffisent pour en avoir raison. On avait donc pris soin d’accumuler dans le Customs bill les dispositions qui avaient paru les plus efficaces pour gêner l’exploitation de ces compagnies et les exposer, en dépit de leur prudence, à de fréquentes contraventions. Ainsi fut créé un régime d’oppression que les journaux des grands ports d’Australie définirent en une expression caractéristique : Harassing shipping.

La plus originale de ces mesures fut celle concernant les Ships’stores, ou provisions de bord. Elle visait les compagnies postales de navigation, anglaises et étrangères, dont les bâtimens, venant d’Europe ou y retournant, ont à effectuer entre Fremantle (Australie Occidentale) et Sydney (Nouvelle-Galles du Sud) un parcours de 4 900 milles marins (aller et retour)[1], coupé par des relâches dans les principaux ports. Le Customs bill ordonnait que toutes les provisions, de bouche et autres, consommées à bord, seraient passibles des droits de douane, même en haute mer, depuis l’arrivée du bâtiment sur les côtes d’Australie jusqu’à son départ du dernier port d’Australie, en route pour l’Europe. Afin d’assurer la perception des droits, on avait imaginé de mettre ces provisions sous scellés à l’arrivée au premier port de relâche (Fremantle), pour ne les lever qu’au départ de ce même port, après que le bâtiment aurait achevé son voyage, aller et retour, sur les côtes du continent australien.

La rupture du sceau de la douane était, bien entendu, interdite ; en sorte que si un paquebot, ayant besoin de ses provisions, en cours de route, se permettait cette infraction, il était, dès son arrivée au prochain port de relâche, saisi, jugé et condamné à une forte amende.

Cette prétention dépassait la mesure tolérable : d’abord, parce qu’un droit à l’importation ne peut s’appliquer qu’à des marchandises importées, c’est-à-dire consommées dans le pays ou débarquées pour cet objet ; en second lieu, parce qu’un bâtiment naviguant en haute mer cesse d’être sous la juridiction des autorités douanières, à quelque titre que ce soit. La douane australienne pouvait, à la rigueur, réclamer le paiement des droits sur les

  1. 9 000 kilomètres.