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l’industrie de la soude, comme celle de l’aluminium, comme celle des becs à incandescence, et mille autres ne sont que des prolongemens de la science.

Dans les industries fondées sur les propriétés physiques des corps, on sait avec quelle fréquence des incidens d’atelier mettent le théoricien sur la voie des découvertes les plus hautes. La liste serait bien longue des observations fortuites faites chez les constructeurs et qui sont devenues l’origine de découvertes nouvelles, soit en électricité, soit en optique, soit en toute autre branche de la physique. Et il est presque oiseux de rappeler qu’à l’inverse, des résultats de laboratoire qui semblaient devoir à tout jamais rester renfermés dans les limites de la science abstraite, se sont transformés en résultats industriels, depuis le noircissement à la lumière du chlorure d’argent constaté par Charles, jusqu’au déplacement, observé par Œrstedt, de la boussole par le courant électrique et la phosphorescence déterminée au travers de corps opaques par M. Rœntgen, au moyen des rayons cathodiques : de là nous sont venues la photographie, la télégraphie, la radioscopie.

En histoire naturelle, on peut affirmer que la géologie est née des travaux empiriques des premiers mineurs et que, réciproquement, tous les grands progrès si immédiatement tangibles, de l’exploitation minérale, ont été procurés par les découvertes de la géologie pure.

On doit même, à ce sujet, remarquer qu’il s’est fait progressivement comme une manière de renversement dans l’importance relative de la science et de l’industrie, en ce qui concerne leurs rapports mutuels depuis l’origine des choses. Au début, tous les initiateurs de la géologie sont des mineurs : Werner, Agricola, et tant d’autres, cherchent à codifier, à exprimer en corps de doctrine et à résumer sous forme de lois, les faits que l’exploitation a mis accidentellement sous leurs yeux ; les premiers traités de géologie sont des manuels de praticiens. Aujourd’hui, on peut dire que les directeurs des grandes entreprises minérales sont avant tout des géologues.

Qu’il s’agisse d’ouvrir une mine de houille, ou de creuser un tunnel au travers d’une montagne ou de forer un puits artésien, c’est au géologue que l’industriel commence par s’adresser et, s’il est avisé, il relire de sa consultation des résultats immédiats : les exemples des houillères découvertes dans le Boulonnais par