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Mercédaires et Lazaristes n’étaient mus que par un sentiment d’humanité et de solidarité catholique, les agens du roi de France eurent en vue un intérêt patriotique. Ils s’efforçaient de réintégrer dans les équipages de la flotte des centaines de capitaines et des milliers de matelots, qui avaient été capturés avec nos navires, que dis-je ? dont la plupart faisaient un service forcé sur ceux des Algériens. La persévérance du gouvernement français à racheter ces esclaves et à protéger notre marine marchande n’eut d’égale que la mauvaise foi des Algériens dans l’exécution des traités. On en fut réduit, après Pontchartrain, à une politique de conciliation vraiment humiliante ; en 1830, il restait encore 122 esclaves, en majeure partie français, dans les bagnes d’Alger.

Il fallait en finir. La présence de ce nid de pirates, à trois jours de Marseille, était une honte pour l’Europe et un reproche pour notre gouvernement. Une dernière insulte faite à notre consul par le dey Baba-Hussein, amena la rupture et décida Charles X à tirer le glaive justicier de la France. On sait le reste : la prise d’Alger le 5 juillet 1830. Aujourd’hui l’odjak des corsaires redoutables a fait place à une grande ville de commerce et de plaisance. A la place des bagnes et des marchés aux esclaves s’élèvent des hôtels somptueux et de florissantes écoles et facultés. Et sur la kasbah, cette bastille des Barberousse, flotte le drapeau tricolore, symbole de liberté, de progrès et de justice.


GASTON BONET-MAURY.