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Page:Revue des Deux Mondes - 1906 - tome 36.djvu/949

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très personnelles qui allaient s’accuser dès sa sortie de la Villa Médicis : vous serez frappé de cette facilité à tout comprendre, à tout exprimer dans tous les genres ; vous admirerez le Bon Samaritain, qui souleva l’enthousiasme du public et, en 1880, valut à M. Aimé Morot, à l’âge de trente ans, la Médaille d’honneur, Jésus de Nazareth, Mérodiade, les Ambronnes, sa Dryade, sa Femme au bain, ses combats de taureaux : Bravo Toro, Toro Colante ; ses charges, le Troisième Cuirassiers à Elsasshausen, Rezonville, Reichshoffen, qui compteront parmi les plus beaux tableaux de bataille ; charges héroïques où l’on ne peut contempler sans émotion, dans leur grandeur épique, la sublimité des expressions guerrières et l’envolée idéale des chevaux soulevés par ce vent de furie. Ainsi que le dit si justement M. Charles Moreau-Vauthier, ce peintre qui lance ces escadrons compose de gracieuses allégories, comme la décoration du plafond de l’Hôtel de Ville de Nancy, et sait aussi se plier aux exigences du portrait. Comme ils sont naturels, vivans, ces portraits de Gérôme son beau-père, de Mademoiselle Gérôme à cheval, de Mademoiselle Brice, de Madame Aymé Darblay, de Monsieur Henri Germain, de Madame Aimé Morot et sa fille et celui de Monsieur Ernest Hébert, à la fois si sobre, si noble, et si expressif ! Ces soixante planches sont elles-mêmes des merveilles de reproduction.

L’art contemporain n’offre guère de nom plus justement célèbre que celui de Jean-Paul Laurens, ce grand peintre d’histoire, dont l’œuvre à la fois simple et noble, sévère et puissante, si bien faite pour émouvoir et pour faire penser, est l’une des plus considérables et la plus régulièrement parfaite qu’un artiste ait produite. Aussi, avec quel enthousiasme et quelle reconnaissance l’ouvrage que publie M. F. Thiollier, et qui contient de nombreuses reproductions d’œuvres, d’eaux-fortes, phototypies, gravures avec l’approbation et sous le contrôle du maître, ne sera-t-il pas accueilli, non seulement par ses élèves, auxquels il est prédestiné, mais par ses nombreux admirateurs ! On y assiste en quelque sorte à chaque page à l’éclosion de l’œuvre, en suivant les premiers projets, les esquisses, les études préparatoires, les croquis d’après nature qui encadrent tous les tableaux. Toutes montrent son travail persistant et sa probité artistique parfaite ; ce n’est pas la moindre curiosité de ce précieux ouvrage, et la vue en est plus suggestive que tout ce qu’on en pourrait dire. Depuis la Mort de Caton d’Utique, la première toile qu’il exposa, à l’âge de vingt-cinq ans, que de tableaux célèbres se succèdent en trente-cinq ans ! En 1872, le Pape Formose et la Mort du Duc d’Enghien, puis la