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Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 37.djvu/233

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déclaration fait par le Pape, il avait persisté dans la même voie. Le nouveau projet décide donc que les biens de l’Église iront tout de suite aux communes. Ce sera d’ailleurs pour elles, dans beaucoup de cas, un triste cadeau de jour de l’an ! Les déclarations antérieures faites à ce sujet par M. Briand restent vraies. Les biens ecclésiastiques sont encombrés, alourdis de charges nombreuses que les communes devront remplir, et, si elles ne le font pas, on tremble à la pensée de tous les procès auxquels elles seront exposées ! Ce sont des « nids de vipères, » disait il y a quelques jours à peine M. Briand, en parlant de ces biens équivoques. Ils n’ont pas changé de caractère parce que le gouvernement s’est cru obligé de changer de politique, et les communes éprouveront bientôt autant de regrets de les avoir reçus que les paroisses de les avoir perdus.

Mais les radicaux-socialistes n’ont pas vu autre chose dans le projet de loi. Tout ce qui se rapporte à l’organisation de l’Eglise leur a semblé indiffèrent, et peut-être n’avaient-ils pas tout à fait tort. Que les catholiques s’organisent suivant la loi de 1881, ou suivant celle de 1901, ou encore suivant celle de 1905 quand cette dernière sera allégée des biens ecclésiastiques, que leur importe ? Ce que nous venons de dire nous-même ne nous éloigne pas beaucoup de la même conclusion. Les biens seuls intéressaient les radicaux : ils voulaient les prendre complètement, immédiatement ! Ils ont même songé à disjoindre cette partie du projet de tout le reste pour la voter toute seule et il a fallu au gouvernement un effort énergique pour s’y opposer. Des intrigues très actives s’ourdissaient déjà dans l’ombre contre lui. M. Clemenceau y a coupé court, au moins pour le moment, par la manière brusque dont il a pris à partie M. Pelletan à la tribune, et dont il a fait sentir à la Chambre elle-même les lanières de son éloquence sèche et tranchante. Mais on n’a pas pu empêcher la Commission de renverser l’ordre des articles de la loi, et de mettre au commencement tout ce qui se rapportait aux biens ecclésiastiques, avec l’arrière-pensée persistante que, ces dispositions une fois votées, la suite deviendrait ce qu’elle pourrait. Ce calcul a d’ailleurs été déjoué : la loi a été votée tout entière.

La discussion a été courte, et, la droite ayant annoncé l’intention de s’en désintéresser après avoir protesté, il n’y en aurait pour ainsi dire pas eu si M. Ribot, dans un discours bref, pressant, éloquent, n’avait pas éclairé le point le plus mal venu de cette loi de circonstance, dont on ne saurait dire, comme on l’a fait de la loi de 1905, qu’elle se suffit à elle-même. Elle sera certainement suivie de plusieurs autres