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même ne sont rien lorsque la cause en est honorable. Quelles persécutions ne me sembleraient pas douces si mes faibles efforts avaient pu éclairer un esprit, échauffer un cœur, gagner un partisan à votre Roi !

« Je sens, monsieur le comte, et il m’en coûte infiniment, je sens qu’il faut prendre congé de vous. Vous me permettrez même de vous prier de brûler mes lettres. On imprime les papiers des Inquisiteurs de Venise. L’Allemagne est menacée d’un bouleversement ; la Suisse s’avance vers le précipice ; les traîtres sont partout. Il faut trembler sur toutes les correspondances. Cependant, je vous demande encore une lettre. Dites-moi, monsieur le comte, que le Roi daignera conserver une place à mon nom au livre où sont écrits les noms de ses partisans les plus purs et les plus décidés. Dites-moi surtout que vous espérez toujours. — Pour moi, Monsieur, je suis inébranlable. Je veux encore croire que le monstre révolutionnaire na travaillé que pour le Roi. J’espère que le 4 septembre achèvera de convertir les Français. Trop d’aveugles ne voulaient, ne demandaient que le repos. Ah ! puissent-ils enfin comprendre qu’il ne peut y avoir de repos pour eux que dans les bras de leur souverain ! Quelle expérience leur faut-il encore, et jusqu’à quand veulent-ils rêver des constitutions ? Mon espérance la plus douce, mes vœux les plus ardens sont que le voile fatal tombera de lui-même et que le roi des Français, ne devant sa restauration qu’aux Français, ne devra la payer à personne. Qu’il soit connu, qu’il soit aimé, et que l’amour relève l’oriflamme.

« Daignez, monsieur le comte, mettre mes remerciemens aux pieds de Sa Majesté. Les assurances de son estime sont inappréciables, et le rédacteur même sera bienvenu chez moi lorsqu’il me les apportera.

« Je tremble sur cette seconde lettre annoncée dans le post-scriptum de celle du 28 septembre. Elle est prise sans doute. Sera-t-elle encore la matière d’un nouvel éclat ? Je le crains beaucoup. J’espère au moins qu’on n’aura pas volé le Roi. On n’aurait pu le faire sans un faux qui me paraît difficile. Combien je regrette, monsieur le comte, que les relations précieuses que j’ai eues avec vous aient amené une aventure aussi désagréable pour vous que pour moi ! Mais quoi qu’il arrive, je me féliciterai toute ma vie d’avoir pu intéresser par mes efforts, quoique très légers, le maître auguste auquel vous êtes attaché. Un jour peut-être,