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traduction bourguignonne) « il mit s’esperance en Dieu et il fu couverz de l’ombre d’icelui et ala en exil sanz paour, ensemble sa femme ; et, comme il est escrit de saint Pol, le premier hermite, il converti la nécessité de fuir en bonne volante de penitance. Et certes li diz Girarz ne fu onques conneüz de set anz, mais mena vie povre et aspre, alanz hublemment et très dévotement par les diz set ans, par lequel nombre perfections est signifiée. A la fin… il conmença faire dévotement ce vil mestier de charbon par quoy les huevres de fevre sont faites, et detrahoit en apert et portoit granz charges a ses propres espaules et acque-roit son vivre en tel manière et en vivoit povrement. Et certes sa femme aprit diligemment a taillier et a coudre, et acqueroit aussi sa viande d’un chascun jour (§ 14). »

Après ces sept ans de pénitence, les nobles ermites, comme dans le poème, rentrent dans le siècle : la veille de la Pentecôte, Girard et Berte viennent à Paris, déguisés en pèlerins. Girard, sous prétexte de mendier, s’approche de la reine et se fait reconnaître d’elle ; comme dans le poème, elle lui donne aussitôt des baisers et se charge d’apaiser le roi. Elle y réussit plus complètement que dans la chanson de geste, car ici Dieu touche le cœur de Charles : et c’est de son plein gré qu’il rend à Girard son amitié (§ 29).

Comme dans le poème, Girard rentre sur sa terre, et, fidèle aux pratiques de piété et d’austérité qu’il a commencé d’aimer lors de sa vie misérable, il se consacre à des œuvres de dévotion, aidé par Berte, qui se voue au service des veuves, des orphelins et des pauvres, à l’exemple de sainte Marthe ; et sa patronne est aussi sainte Marie-Madeleine (§ 32).

Mais le démon, irrité, ranima bientôt la discorde. Il excita contre Girard des traîtres qui le desservirent auprès du roi Charles, et la guerre se ralluma à propos des anciennes querelles, praccipue ob patrimonia conjugum ; et c’est après tout la même façon de motiver cette seconde guerre que dans le poème, où ce sont les causes initiales des démêlés qui se réveillent.

Pour se défendre, Girard appelle autour de lui ses fidèles et ses alliés et praecipue reges Hispaniae consanguinitate sibi propinquos : de même, dans la chanson de geste (§ 319, par exemple), viennent au secours de Girart Gilbert de Tarragone, Raimon Berengier de Barcelone, etc.

Charles ravage la terre de son ennemi ; Girard, qui ne voudrait