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origines et les débuts dg son œuvre ; elle oubliait de conter les nombreuses péripéties qui en signalèrent la naissance et le développement.

Il y avait trois ans que, dans le quartier Saint-Antoine, elle s’occupait des enfans, quand, en mars 1894, sur la demande de quelques mamans, elle pria par une circulaire les familles de lui envoyer tous les jeudis, de deux à quatre heures, impasse Saint-Ambroise, les petites filles âgées de six à dix ans ; des dames leur apprendraient ce jour-là à coudre tout en les amusant. Le 29 mars, vingt-deux petites filles se présentèrent ; en 1896, elles étaient cent cinquante et amenaient leurs petits frères. On ne voulut pas recevoir les petits frères : les petits frères revinrent toujours, quoi qu’on fit. Un ouvroir fut créé où l’on confectionnait des mouchoirs et où l’on marquait des canevas. Mais, en juin 1896, le propriétaire du local signifia son congé à Mlle Gahéry. Elle s’en alla 36, rue du Chemin-Vert ; c’étaient, sous les toits d’une fabrique de conserves, un grenier, deux petites chambres et une cuisine, — quelle cuisine ! — Des toiles divisaient le grenier en trois parties que desservait un couloir de planches. Mlle Gahéry, dès lors, habita où était son œuvre. Les garçons affluaient comme les filles… Cependant, l’incendie du Bazar de la Charité alarma et Mlle Gahéry, et les parens, et les enfans. Au-dessous du grenier s’entassaient bonbonnes d’huile et caisses d’emballage ; les ouvriers soudaient leurs boîtes avec des lampes toujours allumées ; il y avait pour toute issue l’escalier de bois, et les fenêtres du grenier ouvraient sur une cour vitrée. On décida de chercher un abri plus sûr. On le découvrit en septembre 1897 au n° 72 de la rue de la Folie-Regnault. L’œuvre était comme sous le nom d’Œuvre de Popincourt, quand, à la fin de 1898, à la suite d’incidens d’ordre particulier, Mlle Gahéry se retira avec ses collaborateurs de la première heure. On loua une boutique rue Emile-Lepeu, où l’on reprit la tâche interrompue, puis on déménagea le 6 février 1899 au n° 170 bis de la rue de Charonne. L’œuvre, qui s’appela l’Union sociale de Charonne, fut très vite prospère. Trois cents enfans, garçons et filles, la fréquentaient régulièrement, et son action s’étendait à près de deux cents familles. Mlle Gahéry avait cru nécessaire de s’adjoindre un comité directeur ; il y eut conflit entre elle et le comité, et le comité lui intima un beau jour l’ordre de laisser la place libre pour le 20 octobre. Dans le passage