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Aucun délai n’est imposé pour l’achèvement des travaux. La ligne, à voie normale, doit permettre la circulation de trains express marchant à la vitesse moyenne de 75 kilomètres à l’heure. Il faut donc éviter les rampes trop fortes et les courbes de trop petit rayon. Cette sujétion majore singulièrement le prix de revient. En revanche, la Société obtient un grand nombre d’avantages accessoires fort appréciables : droit de navigation sur le Tigre, l’Euphrate et le Chatt-el-Arub ; privilège de construire et d’exploiter des ports à Bagdad, à Bassora et sur le golfe Persique ; concession éventuelle d’embranchemens se détachant du réseau pour aboutir à la Méditerranée entre le port de Mersine et celui de Tripoli de Syrie.

Il est certain que, dans son économie générale, la concession de 1903 fait à la Société d’Anatolie une situation extrêmement favorable. Mais, à côté du contrat, il faut tenir compte d’autres élémens. Deux questions capitales se posent : de quelles conditions techniques dépend l’entreprise ? Et d’autre part, comment se présente l’organisation financière ?

Le parcours n’offre de difficultés topographiques vraiment sérieuses que dans la traversée du Taurus, énorme chaîne dont le massif central dépasse 3 500 mètres. En quelques mois, le rail a été posé jusqu’à Erégli et Boulgourlou, au pied du Boulghar-Dagh. Cette première section de 200 kilomètres ne rencontrait aucun obstacle. Konia, la tête de ligne, est située sur le plateau, à 1 027 mètres, et cette altitude se maintient jusqu’au terminus provisoire, la station de Boulgourlou.

Là commence la seconde section, celle qui doit aborder le redoutable massif du Taurus. Les études, activement poussées durant l’été de 1906, sont à l’heure actuelle achevées. Contrairement à une opinion très répandue, la ligne n’empruntera pas le défilé de Gülek-Boghaz, les célèbres Portes de Cilicie, route classique des invasions, d’Alexandre et des Croisés. Si les Pylæ ciliciæ, avec leur altitude modeste de 1 160 mètres, ouvrent un passage facile aux caravanes de chameaux et même aux véhicules des touristes, les pentes vertigineuses du versant méridional rendent la descente impraticable pour les locomotives. Les masses montagneuses s’abaissent brusquement au niveau de la mer sur l’étroite bande côtière qu’arrose le Tarsous, l’ancien Cydnus, dans les eaux duquel Frédéric Barberousse trouva la mort. Le tracé définitif remonte au Nord-Est le long de la