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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 avril.


Nous sommes, depuis quelques jours, submergés sous le flot des papiers de Mgr  Montagnini. Les journaux en sont remplis : les uns les puisent directement, on ne sait à quelle source cachée ; les autres les reproduisent, tout en protestant quelquefois contre le scandale au quel ils se voient obligés de prendre part. Ce scandale est si grand en lui-même que la question de savoir d’où vient l’indiscrétion qui l’alimente ne semble plus avoir qu’un intérêt secondaire : presque personne ne la pose. Nous la posons pourtant. D’où viennent tous ces papiers ? Qui les a livrés à la publicité ?

Ils viennent originairement d’une instruction judiciaire. L’ancienne nonciature a été envahie et main basse a été faite sur ses archives, sous prétexte qu’on y recherchait des preuves de la culpabilité de M. l’abbé Jouin, accusé d’avoir provoqué à la violation des lois. S’il s’était agi d’une affaire ordinaire, les papiers intéressant règlement l’instruction auraient été retenus par elle, et les autres restitués à qui ils appartenaient. Mais il ne s’agissait pas d’une affaire ordinaire ; M. Clemenceau, pressé par M. Ribot, a fini par l’avouer à la Chambre ; il s’agissait d’une affaire politique. Dès lors, qu’a-t-on fait ? Comment a-t-on procédé ? Tous les papiers de Mgr  Montagnini ont-ils été versés au dossier de l’instruction ? Est-ce de ce dossier qu’ils se sont échappés ? Quelque habitués que nous soyons aux choses les moins vraisemblables, une pareille hypothèse semble, au premier abord, paradoxale. Il n’y a aucun lion d’aucune sorte entre les mille et un papiers de l’ancienne nonciature et le délit pour lequel M. l’abbé Jouin est poursuivi. Donc, si ces papiers ont été versés au dossier de l’instruction, l’abus est sans précédent, et on ne saurait protester avec