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sans même demander des instructions à Paris, répondit incontinent : « Un mariage avec une princesse portugaise n’ôte pas son caractère essentiellement allemand à un prince qui porte le nom de Hohenzollern ; tout le monde verra en lui un Prussien, et ce dont, pour ma part, je puis lui répondre, c’est de l’impression que produira un pareil caractère, attribué à sa candidature, sur l’unanimité de l’opinion publique en France. »

Prim ne pouvait plus prétendre qu’on n’eût pas informé son gouvernement de l’effet immanquable de la candidature Hohenzollern.


IV

A son retour en Espagne, Prim s’était trouvé aux prises avec une candidature plus turbulente que celle d’aucun prince : la candidature de la République. Les républicains, grisés par leurs criailleries, se crurent en état d’enlever le pouvoir de force. Ils firent des levées d’armes à Barcelone, Saragosse, Valence. Mais, en Espagne, tant que l’armée ne se mêle pas aux insurrections, elles n’ont point de chances de succès. Or l’armée et ses chefs détestaient la République. Serrano, enclin aux condescendances, n’en avait aucune pour elle, Prim n’entendait pas être supplanté par la rue. Des mesures énergiques furent prises ; les garanties constitutionnelles suspendues (5 octobre), l’ordre rétabli facilement, l’impuissance du parti républicain mise hors de doute. La monarchie resta définitivement dans le fait, comme elle l’était déjà dans le droit, la condition fondamentale de l’ordre futur, et la recherche d’un roi redevint la préoccupation instante.

A la suite d’un nouveau refus de Don Fernando, Prim eût voulu attendre, disant que la désignation du Roi ne pressait pas, que ce qui importait, c’était le rétablissement de l’ordre public et qu’on n’en était pas encore là. Les Unionistes plus pressés voulurent lui forcer la main et l’obliger à choisir un roi sans retard, présumant qu’aucune nouvelle candidature ne se produirait et que celle de Montpensier s’imposerait. Un des argumens contre ce candidat était que, nonobstant son indifférence officielle, l’Empereur en éprouverait une vive contrariété et lui créerait des embarras. « Quelle erreur ! répondaient les Unionistes, l’Empereur réfléchira et se convaincra qu’il n’a qu’à gagner