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six membres élus pour un an, au scrutin secret, par un congrès annuel réunissant des délégués de toutes les associations. Le Comité choisissait lui-même un bureau chargé des mesures exécutives et responsable devant le Congrès. Traïko Kitamtchef, instituteur macédonien, fut le premier président élu. Jusque vers 1899, la politique du Comité resta modérée et docile aux conseils du gouvernement de Sofia ; mais un parti plus révolutionnaire, partisan de la violence et de l’action directe, grandissait parmi les réfugiés et parmi les jeunes officiers de l’armée. Dès 1895, le lieutenant Boris Sarafof dirigeait une incursion sur la petite ville de Melnik et s’en emparait pour quelques heures : c’est l’origine de sa popularité et de son influence. Vers 1899, le parti des agitateurs, inspiré par lui, l’emportait et se signalait par des violences comme l’assassinat du professeur valaque-macédonien Michaïleanu, accusé d’avoir, dans son journal, dénoncé aux vengeances des Turcs deux Macédoniens bulgares, et tué dans les rues de Bucarest. En même temps se développait, en Macédoine même, l’« Organisation intérieure » sous l’impulsion d’un chef énergique et populaire, Deltchef, qui parcourait les trois vilayets, pourchassé par les Turcs, mais toujours sauvé grâce à sa bravoure, et au dévouement fanatique de ses partisans. Cette vaste organisation insurrectionnelle et révolutionnaire était dirigée par un Comité intérieur, siégeant à Salonique : il avait divisé le pays en huit sandjaks révolutionnaires (Salonique, Monastir, Uskub, Sérès, Drama, Stroumitza, Melnik, Andrinople) et chaque sandjak en cazas ; chaque comité local avait son autonomie pour l’action de propagande, mais devait envoyer un délégué à la réunion générale annuelle. En outre, dans chaque sandjak, un comité d’inspection de trois membres était chargé de contrôler la gestion financière des comités de cazas, de veiller à l’élection des délégués au Congrès, d’aider les prisonniers, de surveiller les actes des fonctionnaires ottomans.

Ainsi, dans toute la Turquie d’Europe, s’organisait une sainte-vehme, avec ses tribunaux, sa force armée, son administration, levant des impôts sur la population, jugeant et faisant exécuter ceux qui refusaient de lui obéir ou qu’elle soupçonnait de la trahir. Sarafof et ses partisans allaient trouver dans cette organisation l’instrument nécessaire à leur politique. A la suite de l’assassinat de Michaïleanu, Sarafof, inculpé comme complice et instigateur du crime et acquitté, avait dû donner sa démission