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rappelés. Mais, la rébellion une fois réprimée, on laissa se relâcher cette politique des races, de moins en moins consciente et rigoureuse à mesure qu’on cessait de craindre militairement les Hovas. Dès lors, les institutions, notamment dans l’enseignement, et la centralisation excessive du gouvernement à Tananarive, concoururent à reconstituer l’hégémonie hova, l’œuvre administrative détruisant ainsi peu à peu celle de la tactique. Cette hégémonie est d’ailleurs vivement souhaitée par nombre d’Européens. Elle plaît à leur besoin foncier d’ordre que renforce l’éducation reçue dans les écoles administratives de Paris ou dans les bureaux : elle leur paraît la seule compatible avec les idées qu’inculquent les Ecoles de sciences morales et politiques sur la supériorité du Protectorat et la nécessité de développer parmi les races indigènes celle dont la nationalité est la plus organisée, — c’est là une des formes, non des moins dangereuses, qu’a revêtue après 1870 la politique des nationalités, réduite à chercher désormais hors d’Europe son champ d’exercices. Enfin elle sourit à leur paresse sous le ciel tropical : les Hovas fournissant le plus grand nombre des employés de bureau qui les servent tous les jours, ils cèdent machinalement à leur accorder les faveurs. Il convient de s’arrêter avec le plus d’attention sur ce point capital.


IV. — L’HEGEMONIE HOVA ET LA POLITIQUE DE L’ASSIMILATION

La supériorité intellectuelle des Hovas entre tous les Malgaches est unanimement proclamée par les Européens, parce qu’ils ont toujours considéré la souplesse et la rapidité à comprendre et à imiter comme le principe de l’intelligence : telle, elle frappait, dès le XVIIIe siècle, Mayeur que tous se plaisent à citer aujourd’hui pour autoriser leurs préférences personnelles ; mais il convient déjà de ne pas oublier que Mayeur les a observés sous le règne d’Andrianapoimerina, à l’apogée de leur grandeur. Cette conviction de leur supériorité a été assez impérieuse pour pousser un de ceux qui ont le plus sagacement apprécié les Hovas, avec des considérations partielles très pénétrantes et justes, à conclure : « Je déclare que notre entreprise (de conquête et de francisation) est un crime. Un crime contre le droit des gens, comme le seraient la conquête et la réduction en servitude du peuple japonais. » Nous citons cette opinion