Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 40.djvu/375

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

religions. M. Steeg, alors consul à Salonique, écrivait le 15 décembre 1902 : « Aussi longtemps que durera la domination ottomane, si parfaite, si paternelle que puisse devenir sa manière d’administrer, on ne pourra jamais espérer que les populations chrétiennes s’en déclarent pleinement satisfaites ; chacune d’elles aspire, en effet, à échapper définitivement à l’autorité turque, soit par l’annexion à celle des nations aujourd’hui indépendantes à laquelle elle se rattache par les liens du sang et de la langue, soit au moyen d’une autonomie locale qui lui donnerait la prépondérance. » Le seul moyen, pour le Sultan, de conserver son autorité sur ces populations, c’est précisément de leur accorder assez de libertés pour qu’elles puissent s’en contenter, assez de garanties pour qu’elles puissent avoir confiance dans les hommes chargés de les administrer.

Lorsqu’on aura ainsi créé les divers organes d’une administration autonome et que chacun sera placé sous la haute surveillance d’Européens, il se pourrait qu’il parût opportun de couronner l’édifice en choisissant un chrétien pour gouverner ces populations en majorité chrétiennes. Ce gouverneur ne devrait être pris ni parmi les peuples des Balkans ou de l’Empire ottoman, ni chez les grandes puissances : le Sultan pourrait le choisir, sur la présentation ou avec l’assentiment des ambassadeurs, dans un pays neutre ou faible. Les districts albanais, actuellement compris dans les trois vilayets, pourraient en être distraits pour former, avec le reste de l’Albanie, un autre gouvernement. Le gouverneur de la Macédoine aurait avec lui, du moins pendant les premières années, une gendarmerie encadrée par des officiers, des sous-officiers et des soldats européens ; il aurait des fonctionnaires chargés de réorganiser toutes les branches de l’administration. Il faudrait, naturellement, que les puissances qui assumeraient collectivement la responsabilité de régir la Macédoine et de la pacifier, consentissent à lui faire l’avance de l’argent nécessaire à une telle réorganisation. Le Sultan resterait le souverain du pays ; des garnisons turques, en nombre, suffisant, pourvoiraient aux nécessités de la défense de l’Empire. On aboutirait ainsi à un régime qui se rapprocherait de celui qui a été organisé pour le Liban à la suite de l’expédition française de 1860, par le protocole du 9 juin 1861. Le gouverneur pourrait être assisté d’un conseil de délégués de chacune des nationalités ; une large décentralisation