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Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 40.djvu/870

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C’est depuis lors, et pas avant, que nous commençâmes à connaître le Congo : il est curieux, et pourtant rigoureusement exact, que nous avons institué sur un pays encore à découvrir une expérience de colonisation engageant plus de 50 millions. A mesure que les représentans des concessionnaires se sont établis et que les fonctionnaires ont pu s’occuper du Congo lui-même, ce nom a cessé peu à peu d’être une simple location administrative. Gouvernement et particuliers se sont avisés que l’unité de cette appellation cachait des diversités naturelles, et progressivement appliqués à modeler leur action sur ces réalités enfin observées. Il a été établi, alors, que le Congo se compose de régions assez différentes : entre la côte du Gabon, qui reçoit des pluies copieuses, et le vaste bassin intérieur où coulent parmi des forêts denses le Congo et ses affluens, la bande montagneuse des Monts de Cristal interpose une sorte de tonsure allongée, couverte seulement d’une brousse, de plus en plus rase du Nord au Sud. Le littoral est marécageux, bordé d’une mer peu active, où les toits blanchis à la chaux des factoreries se reflètent sans clignotement ; au-dessus d’une mince lisière de sable, la forêt équatoriale se dresse ; elle baigne de part et d’autre le pied des Monts de Cristal et s’enfonce au Nord-Est jusqu’aux plateaux volcaniques d’où tombent les sources du Nil. De part et d’autre de l’équateur, cette nature forestière s’atténue ; elle passe à la savane, sur le cours inférieur du Congo d’un côté, dès le grand coude de l’Oubangui et la haute Sanga de l’autre ; le domaine du Chari n’est plus qu’un parc soudanien, aux limites septentrionales duquel, dès avant le lac Tchad, s’annoncent les eaux temporaires et les immensités sans arbres des déserts sahariens.

Notre Congo présente donc toute la gamme des transitions entre l’exubérance moite de la végétation équatoriale et l’aridité des déserts subtropicaux : ses populations sont variées non moins que ses ressources et son climat, nègres chasseurs, fétichistes et anthropophages dans la forêt, pasteurs transhumans suivant les pluies, touchés plus ou moins profondément par l’islam au Nord. Aussi la nécessité s’est-elle affirmée, plus impérieuse à proportion que la connaissance du pays se faisait plus scientifique, d’une administration souple, en progrès de différenciation continue sur l’uniformité des débuts. A l’origine, vestibule du Haut-Nil ou du Chari, le Congo ne comptait que comme