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ajoutaient à la motion allemande un paragraphe transactionnel, qui accentuait la motion allemande, sans cependant mentionner comme la motion française la grève et l’insurrection. La motion belge était ainsi conçue : « Le Congrès n’entend pas limiter le choix des moyens pour empêcher la guerre, mais il subordonne ce choix aux circonstances de temps et de lieu, et surtout à la puissance positive du prolétariat au moment décisif. »

C’est sur ces trois motions qu’une commission nombreuse a été appelée à délibérer. Les meilleurs orateurs ont pris la parole, et ce furent les seules séances vraiment intéressantes du Congrès ; mais la presse bourgeoise en était sévèrement exclue, et nous n’en avons eu que l’écho.

Le premier qui parla fut Bebel, pour dire qu’Hervé n’avait rien inventé. Il avait seulement repris la vieille thèse de Domela Nieuwenhuis, la grève militaire condamnée jadis à Bruxelles. Il n’est pas vrai que la patrie soit chose négligeable, qu’il soit indifférent d’obéir à des hommes d’une autre langue et d’une autre race. Interrogez sur ce point les Alsaciens et les Polonais. Si les socialistes allemands parlaient d’insurrection et de grève, ils tomberaient sous les articles du code pénal, et s’ils se déclaraient antipatriotes, ils perdraient leurs électeurs. La guerre périra d’elle-même, par l’excès de ces tueries, et parce qu’elle menacera d’écroulement la société bourgeoise. La prochaine guerre sera la dernière. La propagande d’Hervé, concluait Bebel, est dangereuse pour la paix, car elle démilitarise la France, rend plus audacieux le parti militaire allemand, et augmente les chances de conflit. — Et Hervé de répondre : « Je ne sais si ma campagne antimilitariste est suivie avec intérêt par l’État-major allemand, mais ce que tout le monde sait, c’est que l’attitude de la Social-démocratie allemande est un sujet d’étonnement et de tristesse, elle paralyse notre action. » Sur ce, M. Hervé qui aime les expressions fortes, au lieu de s’écrier avec le poète « maudite la patrie décevante » s’est « fiché, » pour la centième fois, de la patrie française et de la patrie allemande ; puis il a mis Clemenceau dans le même sac que le Kaiser ; il a répété cet axiome : « Notre patrie, c’est notre classe ; il n’y a de patrie que pour les gens qui mangent bien, » et il a reproché aux Allemands d’avoir institué cette variante : « Prolétaires de tous les pays, massacrez-vous. » Il a, de plus, adressé aux camarades allemands force