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fait, sur lequel il est inutile de discuter. C’est aussi une ère nouvelle qui commence. Le besoin que l’on avait des railroadmen de l’âge héroïque ayant cessé, leur rôle utile étant terminé, leur autorité doit prendre fin. On ne voit plus que les défauts, l’arrogance, l’avidité et les spéculations malhonnêtes de quelques hommes de guerre et de proie, qui « capturent » les lignes rivales et usent du crédit social pour leurs affaires propres, comme les princes de jadis conquéraient les provinces de leurs voisins et risquaient pour leur gloire personnelle le sang de leurs sujets.


III

Mais comment le contrôle de l’Etat va-t-il s’exercer ? Sur quoi pratiquement va-t-il porter ? L’opinion demande à la fois aux chemins de fer de plus grandes facilités de transport, des tarifs plus bas, la réfection des voies actuelles, l’augmentation du personnel pour éviter les accidens, attribués au surmenage des employés, une extension du réseau et la réduction des bénéfices. Tout cela est contradictoire. Si les chemins de fer gagnent peu ou rien, ils distribueront peu ou point de dividendes, ils auront peu ou point de crédit. Et, ne trouvant point d’argent, ils ne pourront construire de lignes nouvelles ni améliorer les lignes existantes.

Les prétentions des voyageurs, en fait d’abaissement de taxes, pourront être mesurées par un détail pris au hasard : on invite l’Interstate commerce commission à faire réduire, pour le trajet de Saint-Paul (Minnesota) à Seattle (Washington), le supplément uniforme de 60 francs, perçu par les Pulmann-Cars, à 20 francs et 40 francs, suivant la place haute ou basse des couchettes dans le compartiment. Pour ma part, je n’aurais pas demandé mieux que de voir ainsi moindre de 33 ou de 66 pour 100 le coût de ces billets de Pulmann, dont ma famille et moi venons justement de faire usage dans ce parcours. Mais il s’agit de quatre-vingt-trois heures de chemin de fer et, pour un Français auquel la Compagnie des Wagons-lits fait payer 46 francs de Paris à Marseille, un supplément de 60 francs pour quatre jours et trois nuits ne semble pas excessif.

De fait, les wagons américains, avec leur tarif de 6 centimes un quart par kilomètre, — 2 cents par mille — un peu plus chers