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Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 41.djvu/581

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pouvait y être de la moindre utilité au l’établissement de la sécurité publique.

Elle pensait, et c’était l’avis de son frère, qu’il n’y avait pas à hésiter sur cette première démarche ; mais qu’il fallait s’emparer du pouvoir au titre le plus modeste, de façon à n’effaroucher personne. Par là on se trouverait en mesure d’agir suivant les circonstances, et les partis pris à tête reposée valaient toujours mieux que ceux improvisés dans des momens d’une si vive agitation.

Nous causâmes de tout ce qui se passait à Paris et à Saint-Cloud. Elle savait le départ et la marche sur Rambouillet, quoique Trianon fût le lieu officiellement désigné. Elle savait aussi la scène faite par M. le Dauphin au duc de Raguse.

Je ne sais si ces nouvelles étaient venues directement à Neuilly, ou avaient passé par Paris.

Pendant que nous causions, Mme de Dolomieu vint me chercher de la part de Mme la duchesse d’Orléans.

— Allez vite chez ma sœur, me dit Mademoiselle, et tâchez de la remonter un peu, elle est dans un état terrible.

Je suivis Mme de Dolomieu jusque chez la princesse où j’entrai seule. Elle était dans sa chambre à coucher, en robe de chambre et en papillotes, assise dans un grand fauteuil, le des tourné au jour.

La princesse Louise, à genoux devant elle, la tête appuyée sur un bras du fauteuil, toutes deux étaient en larmes. Mme la duchesse d’Orléans me tendit la main et m’attirant à elle s’appuya sur moi et se mit à sangloter. La jeune princesse se leva et sortit, je pris sa place.

Sa mère continua à se tenir serrée contre moi en répétant à travers ses pleurs : « Oh ! quelle catastrophe ! quelle catastrophe !… et nous aurions pu être à Eu ! »

Je parvins à la calmer un peu. Je lui parlai du vœu si généralement exprimé ; du beau rôle que M. le duc d’Orléans avait à jouer ; de la manière dont il était désiré par tout le monde. Je le croyais, et de plus cela était vrai, je dois le redire encore. Du bon effet de la proclamation, je la lui répétai.

Elle ne s’arrêta pas au titre, mais elle fut frappée de l’expression : « La Charte sera désormais une vérité. » Elle l’approuva, elle me parla de son mari, de la pureté de ses intentions avec l’adoration qu’elle lui porte. Je me hasardai à lui dire :