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gouvernement prussien, Pie IX, de lui-même, installa sur le siège de Cologne Melchers, évêque d’Osnabruck, qui deux fois avait été proposé par le chapitre. Dans quelle mesure, à l’avenir, demeurerait-il licite aux chanoines de procéder à une élection, lorsque la majorité ou même l’unanimité des noms au sujet desquels ils auraient pressenti le ministère aurait été repoussée par la bureaucratie d’Etat ? Cette question subsistait, non résolue, jusqu’à de prochaines vacances. C’était à Dieu de l’assoupir en donnant longue vie aux évêques du royaume de Prusse ; et la solution trouvée par la Cour de Rome ne créait au profit de l’Etat aucun précédent périlleux, dont le grand-duc de Bade se fût empressé de faire loi pour la collation du siège de Fribourg.

Mais si les froissemens entre l’Eglise et l’État prussien étaient ainsi momentanément conjurés, c’était à la Chambre élue en 1867, c’était dans les municipalités, que se multipliaient les symptômes graves. Il semblait que Carlsruhe et Mayence, où les Chambres s’épuisaient en débats antireligieux, allaient être imités par Berlin. Les catholiques s’inquiétèrent, en décembre 1868, en voyant la Chambre prussienne accueillir une pétition de la municipalité de Breslau qui réclamait, contrairement à la loi scolaire prussienne, la création d’une école non confessionnelle, et repousser, en même temps, une pétition des catholiques de cette ville demandant l’établissement d’une Realschule catholique. L’avortement successif de plusieurs projets de loi scolaire ne décourageait pas le parti libéral ; on sentait que de grands débats étaient proches. Une autre question s’agitait : celle des congrégations. En août 1869, l’ouverture d’une chapelle pour quelques orphelins catholiques dans les faubourgs de Moabit donna lieu à de véritables émeutes de la populace berlinoise ; et comme deux dominicains assuraient le culte dans cette chapelle, des pétitions survinrent à la Chambre, réclamant la dispersion des moines. Le jurisconsulte Gneist, qui devait jouer un grand rôle dans le parti national-libéral au moment des luttes du Culturkampf, conclut, au nom de la commission, à la nécessité d’une politique de précautions rigoureuses contre les ordres monastiques ; les vœux précis qu’il émettait étaient en contradiction formelle avec la Constitution et avec la pratique du gouvernement prussien durant les vingt dernières années. L’émotion des catholiques fut grande d’un bout à l’autre du royaume, et puis, soudainement, à leur grande surprise, la question des ordres