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était alors affligée de l’âge de dix ans, en lui-même un bel âge, et peut ne pas en avoir un souvenir précis, excepté qu’en 1829, la question de mon départ pour la Grèce commença à se poser et que votre cœur affectueux y prit quelque intérêt. Il faut néanmoins que vous encouragiez lord Melbourne à parler de ce sujet. Les intentions de Canning étaient les suivantes. Il déclarait que nous devrions rester avec la Russie et par ce moyen prévenir tout malheur. Le duc de Wellington, qui vint chasser chez moi à Claremont en 1828, pleura réellement, bien qu’il ne soit pas disposé de par son tempérament à verser des larmes, et déclara : « Par cette convention, les Russes auront le pouvoir de faire tout ce qu’ils n’auraient jamais osé faire seuls ; » et, « protégés par cette infernale convention, il ne sera pas en notre pouvoir de les arrêter. » La Russie est encore dans cette très commode et confortable position, et la protection spéciale de la Porte est confiée à sa tendre discrétion : la chèvre garde le chou, le loup le mouton, car je ne puis, je le suppose, comparer les Turcs à des agneaux. L’Etat qui ruina l’Empire ottoman, et qui, depuis cent quarante ans, le ronge tout autour dans presque toutes les directions, est le protecteur et le gardien de ce même empire ; et l’on nous dit que c’est la plus scandaleuse calomnie que de soupçonner les Russes d’avoir d’autres projets que les plus humains et les plus désintéressés ! Ainsi soit-il, comme disent les Français, à la fin de leurs sermons. Cette partie de la convention du 15 juillet 1840 semble étrange aux gens impartiaux, d’autant que rien n’abaisse tant la Porte aux yeux du peu de Turcs patriotes qui restent, que la protection de son archi-ennemie, la Russie. Je vous demande de lire cette partie de ma lettre à mon bon et cher ami lord Melbourne, à l’aimable souvenir duquel je désire être rappelé.


La reine Victoria au roi des Belges.


Château de Windsor, 26 septembre 1840.

J’ai lu vos lettres à Palmerston, ainsi que sa réponse, et je vous ai envoyé aussi un papier de lord Melbourne. Je puis vous assurer que je prête à ces affaires la plus sérieuse attention. Il