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à Ephèse. Le vali Kiamil-pacha assista en grand uniforme à l’inauguration de l’école ainsi qu’au service religieux qui précéda. Les Italiens s’étonnèrent cependant que, dans le quartier franc, les agens de police eussent renoncé aux gants blancs qu’ils avaient arborés pour faire honneur au baron Marschall. Le marquis Imperiali célébra, dans ses discours, la grandeur de l’Italie et la beauté de sa langue ; il parcourut à pied les quartiers populaires et répandit, dans la colonie, une pluie de décorations ; les Français purent, à cette occasion, comparer sa générosité à la parcimonie de leur gouvernement qui, depuis dix ans, n’a donné, à Smyrne, aucune croix de la Légion d’honneur. Les observateurs curieux des évolutions politiques ne manquèrent pas de noter le caractère religieux et catholique de toutes ces fêtes. L’ambassadeur rendit officiellement visite à l’archevêque, Mgr Marengo, qui fut fait commandeur des Saints Maurice et Lazare ; une messe solennelle fut célébrée en l’église de la Pointe, qui appartient à ces dominicains qui, depuis le Ier janvier 1906, ont abandonné le Protectorat français. A l’inauguration des bâtimens scolaires, l’archevêque remercia le gouvernement et l’Alliance nationale d’avoir confié la nouvelle école aux sœurs d’Ivrée. Depuis ce voyage de l’ambassadeur, la réconciliation du clergé italien d’Asie Mineure avec le gouvernement du Quirinal est officiellement constatée. Le marquis Imperiali, au mois d’octobre, s’est rendu à Salonique où il a visité les écoles et exhorté les parens, comme à un devoir patriotique, à faire donner à leurs enfans une éducation nationale. On annonce son prochain voyage à Jérusalem.

Il faut, pour goûter toute la saveur de la nouvelle politique italienne et en tirer les leçons quelle comporte pour nous, l’observer parallèlement à la politique française, dont elle forme l’antithèse exacte. Diminution du crédit affecté aux écoles congréganistes d’Orient, rupture avec le Saint-Siège, campagne de certains radicaux contre le Protectorat français dans le Levant, vote par la Chambre, en 1904, d’un vœu tendant « à substituer progressivement des écoles laïques aux établissemens congréganistes que la France subventionne : » tel est, du côté français, le bilan. Il suffira, pour l’apprécier, d’opposer l’adroit et heureux opportunisme des Italiens, leur complet détachement de toute espèce de passion doctrinaire, dès qu’il s’agit de l’intérêt national, aux passions sectaires qui, sous