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avec lui ; et lui, héroïquement, accepte de se taire, sachant le culte qu’elle a voué au souvenir du poète défunt. Là s’arrête, proprement, son « autobiographie ; » mais une note de l’éditeur, en manière d’épilogue, nous informe que Lossie a enfin reconnu son erreur, qu’elle est accourue auprès de Joseph pour le supplier de lui pardonner, et que ces deux cœurs, créés l’un pour l’autre, pourront du moins vieillir et mourir ensemble.

L’intrigue principale d’Alice Tout-Court va être plus facile à résumer. Un jeune peintre sans talent, Charles Heath, amène à ses parens une petite fille qu’il a ramassée dans la rue et qui, lui ayant dit qu’elle s’appelait « Alice Tout-Court, » gardera ce surnom jusqu’au bout du livre. Les parens de la petite fille sont morts tragiquement : le père s’est tué, la mère, après des années d’atroce ivrognerie, a terminé sa vie dans un hôpital ; mais leur enfant est un être délicieux, sage et bon, n’ayant hérité d’eux qu’une extrême sensibilité nerveuse qui va jusqu’au don de seconde vue. Recueillie chez les parens du peintre, riches et honnêtes bourgeois, elle ne tarde pas à se gagner tous les cœurs, et devient, en quelque sorte, le génie protecteur de cette famille. Dès le premier jour, elle adore secrètement le jeune peintre : mais elle ne peut pas l’empêcher d’épouser une cantatrice française, qui le trompe, le torture de toute façon, et finit par s’enfuir avec un amant ; et ce n’est qu’après la mort de cette femme, et après de longues années encore de passion silencieuse et d’obscur dévouement, qu’Alice se marie avec l’homme qu’elle aime. Mais autour de cette intrigue, relativement simple, l’auteur en a entremêlé plusieurs autres beaucoup plus compliquées. L’une d’elles, notamment, relève du spiritisme, avec maison hantée, fantômes de dames galantes du XVIIIe siècle, squelette découvert dans une cave, et reconstitution d’un crime ayant eu lieu, dans ladite maison, vers 1700 ; et nous assistons aussi, chemin faisant, à l’étrange aventure de la résurrection chirurgicale d’une vieille femme presque centenaire, qui, depuis trois quarts de siècle, repose, inconsciente, dans un lit d’hôpital, jusqu’au jour où on la rappelle à la vie en extrayant de son cerveau une pointe de fer, entrée là jadis accidentellement.


Comme on peut le voir par ces analyses sommaires, M. de Morgan, dans le choix de ses sujets, ne se soucie point de profondeur intellectuelle : ses récits n’ont rien de symbolique, et