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A première vue, le spectre des taches semble n’être que le spectre solaire affaibli, de même que celui des facules, plages brillantes que l’on voit autour des taches, n’est que le spectre solaire renforcé. Un examen attentif révèle cependant des différences. En particulier, quelques-unes des raies de Fraunhofer sont sujettes à se renverser sur les taches, c’est-à-dire que la raie noire est partagée dans le sens de sa longueur par une fine raie brillante, et il peut même arriver, dans certains cas, que la ligne brillante remplace entièrement la raie noire.

Les régions du disque solaire où ce renversement se produit ne sont pas limitées à l’aire visible des taches et l’excèdent souvent de beaucoup. Relever les limites de ces régions avec le spectroscope ordinaire serait une tâche très longue, et par là même stérile, car il s’agit d’un phénomène fugitif et variable, et les relevés obtenus devraient, pour être instructifs, embrasser tout le disque et se rapporter à une époque définie.

La photographie, qui a rendu tant de services dans les cas analogues, est seule capable d’opérer avec la promptitude nécessaire. Il faudra que la fente du spectroscope parcoure l’image solaire d’un mouvement continu ou par très courtes saccades. A chaque fois on ne laissera s’imprimer sur la plaque, dans le spectre qui est l’image dispersée de la fente, que la raie considérée, et l’on déplacera progressivement la plaque, de manière à éviter que les images successives ne se confondent. Si les mouvemens ont été bien réglés, on aura comme résultat final une image du Soleil donnée par une seule radiation.

Le principe de cette méthode a été aperçu par M. Janssen et formulé par lui au congrès de l’Association astronomique britannique dès 1869. Mais les difficultés d’exécution semblaient si grandes que l’indication demeura pendant bien des années lettre morte. C’est seulement vers 1890 que le problème fut sérieusement attaqué par le professeur Haie en Amérique, et par M. Deslandres à l’Observatoire de Paris. Ils produisirent à la même époque, et d’une manière tout à fait indépendante, des épreuves qui excitèrent à juste titre la curiosité du monde savant. La surface du Soleil apparaissait comme semée de nuages blancs, principalement accumulés dans la zone des taches, mais répandus aussi dans les latitudes élevées où les taches ne se montrent pas. Ces nuages sont aujourd’hui généralement connus sous le nom de flocculi, proposé par M. Haie. Leur structure est tantôt floconneuse,