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découverts qui se collent à plat contre la pierre. La foule des bêtes industrieuses est telle sur chaque nid, que la ruche en plein vent semble habillée d’une enveloppe brune. Et, tout au sommet, sur la corniche interrompue par des brèches béantes d’où pend la chevelure de misérables arbustes, voici les Iroulaires, chasseurs d’abeilles, maigres et agiles, qui se hâtent avec leurs chaudrons et leurs paquets de cordes sur l’épaule. Les coureurs de brousse, noirs, hérissés, tout nus, à cela près qu’un langouti bride leur ventre exténué, se suivent à la file, semblables à ces araignées hautes sur pattes qui traînent leur cocon après elles. Les Iroulaires sont mes amis, comme les Kourouvikarins, chasseurs d’oiseaux. De temps à autre, ils apparaissent, avec un animal curieux, une statuette déterrée en quelque fondrière inaccessible : une méchante pièce de monnaie les rend contens.

Ces enfans des solitudes ont leurs divinités tutélaires. Les anfractuosités des murailles les abritent, et la nuit, ils les honorent de sacrifices furtifs : Kani, dont l’effigie se détache sur la stèle noire que loge ce petit sanctuaire de briques ; Mariatta dont la statue réduite à sa moitié inférieure, foule aux pieds une tête humaine. Un Pouléar de granit, affreusement mutilé, gît près de l’édicule dont il fut, c’est probable, le primitif occupant. La Mariatta et la Kani sont évidemment très anciennes ; peut-être remontent-elles à la fin du XIVe siècle, époque où les souverains de Vijianagar firent aux Brahmes d’Alampadi cette dotation où il est question de Genji. Très anciens aussi, les fragmens de sculptures, absolument remarquables, qui jonchent les abords du sanctuaire, notamment une figure sur un tronçon de pilier. Debout, les mains jointes devant la poitrine, elle montre encore ses bras d’une longueur démesurée, ses jambes extraordinairement courtes, et, à droite, un vestige de queue. Anouman, bien sûr, présenté de face. En quelle détresse se trouve le bon singe, serviteur de Rama I A peine puis-je distinguer les yeux, les oreilles avec leurs pendans énormes. Les proportions de la statue, qui sont de quatre têtes seulement, crient son antiquité vénérable.

L’édicule est beaucoup moins ancien. Voici, en avant, les ruines d’un second, réduites à une petite esplanade qu’entourent des chapiteaux hémisphériques en morceaux, et un Pouléar martelé. Voilà un étang aux gradins délabrés avec les ruines d’un petit mandapam. Ses colonnes carrées ne portent aucun