Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 43.djvu/844

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avait reçu l’appui de l’Autriche à son avènement, de s’être affranchi de sa tutelle et d’avoir cherché une réconciliation avec la Russie. Le baron d’Æhrenthal ne partage pas les préventions qui ont contribué à amener la retraite de son prédécesseur. L’entente ébauchée, en 1896, entre Sofia et Belgrade n’ayant pu aboutir à cause des propagandes rivales des deux nationalités en Macédoine, l’occasion était bien choisie, au moment où la crise austro-serbe était dans sa phase la plus aiguë, pour opérer un rapprochement entre Vienne et Sofia. M. Stancioff avait-il espéré d’autres avantages de cette politique et de ses relations personnelles avec MM. Isvolski et d’Æhrenthal ? Il vient de quitter le ministère des Affaires étrangères et il ne paraît pas avoir recueilli tous les fruits qu’il attendait de sa méthode. Peut-être même faut-il voir, dans le peu d’importance des résultats obtenus, l’une des raisons déterminantes de l’acceptation, par le prince, de la démission du cabinet Goudeff-Ghenadieff-Stancioff.

Un résultat paraît cependant avoir été acquis dans ces derniers mois : le conflit aigu entre la Roumanie et la Grèce d’une part et, de l’autre, les bonnes relations du prince Ferdinand avec Berlin et Vienne, ont amené une ère nouvelle de rapports confians et de procédés amicaux entre Bucharest et Sofia. Un pont a été jeté sur le Danube : l’expression n’est vraie encore qu’au figuré, elle le sera bientôt au propre. Est-ce là une œuvre durable ? Faut-il y voir l’amorce de cette entente des puissances danubiennes et balkaniques qui, de loin, semble si facile à réaliser et qui, dans la pratique, se heurte à tant d’obstacles, de rancunes anciennes et d’intérêts divergens ? Une telle combinaison de petits États serait de taille à se défendre par elle-même, et à résoudre, au besoin, par ses propres forces ou son propre poids, les questions balkaniques et orientales ; elle serait un obstacle à toute tentative des grandes puissances pour se frayer un passage vers le Bosphore ou vers Salonique ; de plus, par la force des choses et la logique des situations, elle serait amenée à chercher son appui sur la Russie d’une part et de l’autre sur les puissances occidentales, France et Angleterre. La bonne harmonie qui règne actuellement entre les cabinets de Londres, de Pétersbourg et de Paris, apporte, dans les affaires d’Orient, un élément nouveau. Le temps est passé où la rivalité de l’Angleterre et de la Russie était au fond de toutes les complications dans la Turquie d’Europe ou d’Asie. Un accord roumain-serbe-bulgare, conclu sous les auspices des trois