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s’arrête. Il pouvait arriver et il est arrivé en effet qu’à ce moment certaines de ces dépenses ne fussent pas payées. Le liquidateur, en appréhendant les biens de la congrégation, trouvait tout de suite devant lui une première classe de créanciers, les fournisseurs. — La vie, pour une communauté de religieux ou de religieuses, comporte des contrats plus compliqués et plus importans. La congrégation tendait naturellement à profiter de sa force et à l’accroître en répandant hors de sa maison mère des établissemens nouveaux. Mais, pour créer ainsi des maisons filiales, il fallait de l’argent. La congrégation cherchait des capitaux, et trouvait à emprunter. Elle empruntait parfois par elle-même ou par son supérieur ; et le plus souvent sous le couvert d’un prête-nom. Les sommes ainsi prêtées n’étaient pas encore remboursées au jour où la congrégation a disparu. Le liquidateur trouve ici une seconde classe de créanciers. — Il en était une troisième dont l’existence seule montre jusqu’où la tolérance du gouvernement avait porté la confiance générale. Les emprunts des congrégations étaient presque toujours destinés à des constructions. C’était une nécessité de leur développement : c’était aussi bien leur goût. Elles pouvaient donc tenter les prêteurs en leur offrant la garantie la plus sûre que connaisse le Code civil ; celle d’une hypothèque sur les terrains, sur les constructions neuves. C’est sur une telle garantie que le Crédit foncier fait ses prêts. Sollicité par les personnes qui, comme propriétaires apparens, agissaient au nom de la congrégation, il n’hésita pas à avancer des sommes considérables, protégées par des hypothèques. Avec lui, des particuliers qui n’étaient spécialement ni cléricaux, ni anticléricaux, mais qui voulaient placer leur argent, estimèrent que la garantie offerte par les propriétaires apparens était bonne, et donnèrent leurs capitaux contre hypothèque Ainsi, par la nature même du patrimoine des congrégations, et par la confiance dont un établissement officiel, si difficile toujours, donna l’exemple, le prêt hypothécaire se généralisa. Et ce fut une troisième classe de créanciers, que le liquidateur trouva devant lui dès sa prise de possession.

Il était naturel et nécessaire, en face de ces créanciers, que le liquidateur procédât à une vérification des plus sévères. Pour certaines créances, la tâche pouvait être délicate. Pour la plupart, elle était simple. Il était aisé de savoir si la créance était réelle, si les marchandises ou l’argent avaient bien été