Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 44.djvu/148

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

téléphone municipal ; Londres a perdu 50 000 livres sterling en un an avec ses steamers sur la Tamise, faute de cliens l’hiver. Preston gère des docks qui lui coûtent 36 000 livres sterling par an : ces exemples pourraient se multiplier indéfiniment.

Ajoutons qu’il ne faudrait pas en croire toujours aveuglément, quant aux résultats financiers du Municipal Trading, les comptes officiels des villes anglaises. Non pas qu’ils soient intentionnellement préparés en vue de faire apparaître des soldes favorables ; mais, tenus administrativement (comme chez nous) au lieu de l’être commercialement, et d’une façon confuse et embrouillée à plaisir, soustraits d’ailleurs à tout contrôle gouvernemental[1], ils se prêtent aisément à des interversions et des erreurs parfois d’assez sérieuse conséquence. Souvent les municipalités imputent à leurs « Irais généraux d’administration » des dépenses administratives afférentes aux services industriels ou commerciaux, ou bien omettent de faire figurer à la charge des exploitations du gaz ou de l’électricité Je montant des impôts municipaux qu’elles devraient subir, ou bien encore chargent le compte de la voirie des dépenses faites en réalité pour les tramways ou l’éclairage, et ainsi de suite. Ce qui est plus grave, c’est que les villes ne mettent souvent de côté que des sommes insignifiantes et hors de proportion avec les exigences d’une bonne gestion pour l’amortissement du matériel de leurs exploitations industrielles, de sorte qu’elles se trouvent sans garantie contre la dépréciation de ce matériel, et contre l’éventualité toujours à prévoir des renouvellemens nécessités par les inventions nouvelles de la science[2]. Nos héritiers y pourvoiront,

  1. Sauf ceux des « comtés, » des « bourgs » de Londres et des « districts urbains. » Les comptes des villes sont contrôlés d’abord par deux vérificateurs (auditors) élus par les électeurs municipaux (élections dont les votans se désintéressent presque complètement), puis par un conseiller municipal choisi par le maire (Mayor’s auditor). Ce système présentant peu de garanties, la Commission interparlementaire d’enquête sur le Municipal Trading (1903) a demandé que tous les comptes des villes fussent vérifiés annuellement par les Auditors officiels du Local Government Board. fonctionnaires quasi judiciaires investis du pouvoir de rejeter les dépenses illégales et d’en mettre le montant à la charge (surcharge) des ordonnateurs : proposition qui fit jeter les hauts cris aux municipalistes anglais et qui, jusqu’à présent, n’a pas eu de suite.
  2. De 1898 à 1902, la moyenne des sommes mises annuellement de côté par les villes anglaises pour dépréciation du matériel n’est que de 193 000 livres sterling, soit un sixième pour cent du capital engagé : les experts signalent qu’elle aurait dû s’élever à 5 pour 100 de ce même capital, soit à 6 050 000 livres sterling par an. (Voyez lord Avebury, op. cit., p. 67-68. — H. P. Porter, op. cit., 185-187. — Holt Schooling, Local Finance, dans la Fortnightly Review d’août 1906.)