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11 l. 10 sh.[1]. Dès à présent, bien des villes anglaises ont à lutter contre une situation financière fort embarrassée, et de lourdes dettes flottantes à supporter ; pour subvenir à des besoins toujours croissans, bon nombre se sont établies « banquiers, » et, comme Glasgow, Liverpool, Edimbourg, etc., sollicitent des dépôts de fonds : on voit le danger de cette pratique en cas de crise. Déjà le crédit de telles ou telles villes est atteint sur le marché ; West Ham, il y a quelques années, ne trouvait plus à emprunter, et les titres mêmes du Conseil de comté de Londres s’inscrivent aujourd’hui à des cours notablement inférieurs à ceux des valeurs de telle ou telle autre autorité locale plus prudente en affaires. M. Austen Chamberlain, chancelier de l’Echiquier du dernier gouvernement conservateur, se crut fondé dans un de ses budget speeches à attirer sur ce point l’attention du pays, comme l’avaient fait de leur côté des financiers et des hommes d’État tels que lord Goschen, lord Avebury, sir H. Fowler.

Ce n’est pas tout. L’accroissement des charges locales dans les grandes cités municipalisatrices se fait sentir sur les forces vives du pays : les intérêts matériels se sentent menacés, les producteurs se plaignent, et les municipalités avancées voient leur territoire déserté par les industriels en quête d’établissement, par les grandes compagnies surtout, qu’atteint plus que proportionnellement la hausse des impôts urbains[2]. Nombreuses sont les industries qui, depuis dix ans, ont quitté Londres pour aller s’établir en des régions fiscalement moins menacées ; chaque année, l’émigration londonienne progresse, et dans ces derniers temps la proportion des maisons vacantes à Londres s’est élevée de 2 à i pour 100. Le dommage n’est pas seulement pour les ouvriers qui perdent leur gagne-pain, mais pour l’autorité locale qui perd des contribuables, et pour les contribuables restans qui peut-être auront à payer pour les absens !

  1. Report of the Local Government Board for 1905-06, p. CCXIII et 668.
  2. Plus que proportionnellement, parce qu’en Angleterre l’impôt local frappant le « revenu » de la propriété, les municipalités cèdent à la tentation de surélever dans une proportion plus ou moins grande l’estimation du revenu imposable afférent aux immeubles possédés par les chemins de fer, grandes sociétés ou industries, etc. De 1891 à 1901, le total des impôts locaux payés par le Great Eastern Railway a plus que doublé. Dans les communes rurales traversées par une voie ferrée, il est fréquent de voir la Compagnie payer à elle seule la moitié ou les trois quarts de l’impôt local. Voyez de nombreux exemples, avec chiffres à l’appui, dans le Times du 2 septembre 1902.