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dans leur route et forcés à renoncer à une entreprise où ils n’avaient pas grand goût.


Après les échecs du Chêne Saint-Colombin et de la Pénissière, Mme la duchesse de Berry fut réduite à se cacher de nouveau. Cette vie romanesque et vagabonde lui plaisait suffisamment pour l’engager à la prolonger.

En revanche, les ministres, et la famille royale surtout, souhaitaient vivement lui voir quitter le territoire français en sûreté. Les moyens lui en étaient soigneusement, quoique tacitement conservés.

Deux fois elle fut compromise par son monde. On se borna à lui mettre la main presque sur l’épaule sans vouloir la fermer. Un jour, dans l’appartement de Mme de La Ferronnays, abbesse d’un couvent à Nantes, on frappa d’une crosse de fusil sur une feuille de parquet, qu’on n’ignorait pas servir de trappe à une cachette où elle se trouvait. On espérait que ces alertes lui serviraient d’avertissement pour s’embarquer.

Mais loin de là, elle y puisait une folle sécurité, n’attribuant qu’à son habileté son succès à déjouer des recherches si actives. La suite a prouvé combien, dès qu’elles ont été sincères, elles ont obtenu un prompt résultat.

M. de Montalivet, ministre de l’Intérieur jusqu’au 11 octobre et M. de Saint-Aignan, préfet de Nantes dans le même temps, ne se souciaient pas plus l’un que l’autre d’une pareille capture.

Je ne prétends pas ici faire hommage à la générosité du gouvernement français. Il suffit de songer combien l’arrestation de Mme la duchesse de Berry lui préparait de difficultés de tout genre, pour comprendre sa répugnance à l’accomplir.

La Cour royale de Poitiers avait déjà mis la princesse en jugement, avec la comtesse de La Rochejaquelein et quelques autres contumaces. Cette circonstance compliquait encore la position.

Cependant, l’ouverture de la session parlementaire s’approchait. Le ministère, composé exclusivement des hommes du Roi depuis la mort de M. Perier, n’avait pas assez de racines personnelles pour l’affronter, ni assez de talens de parole pour aborder la tribune dans des circonstances graves et difficiles à ce point. Il fallait donc s’y préparer ; le Roi se résigna.

De longues conférences entre les divers candidats, et