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appartient de diriger et de surveiller la théologie. » Les aspirations qui s’étaient fait jour dans le congrès de Munich, amenaient le Pape à combattre, avec un renouveau de vigueur, certaines théories sur la liberté de cette science. Les professeurs et les écrivains catholiques pouvaient-ils s’accorder toute licence, sous réserve de l’adhésion aux dogmes formels que propose à la foi commune l’infaillibilité de l’Église ? Pie IX redisait que non : leurs obligations intellectuelles formaient un réseau singulièrement plus vaste et singulièrement plus ténu. L’Église réclamait qu’ils acceptassent d’elle, tantôt certaines disciplines de pensée que facilement ils trouveraient trop pesantes, tantôt certains postulats de bon sens que peut-être ils seraient tentés de réputer fallacieux, tantôt certaines opinions théologiques qui, sans appartenir à l’édifice du Credo, lui servent en quelque mesure d’arcs-boutans, et tantôt enfin certaines décisions doctrinales qui, pour n’être point infaillibles, requièrent néanmoins l’assentiment intérieur de l’esprit. La théologie, qui avait semblé trôner, à Munich, comme une souveraine aventureuse, réapprenait de Pie IX que, sous le contrôle de la hiérarchie, elle était, avant tout, une écolière et une héritière. L’Angleterre subit le contre-coup de cet incident : lord Acton et Simpson estimèrent que le Home and Foreign Review, qui soutenait des idées analogues à celles de Doellinger, devait cesser de paraître ; et les correspondances récemment publiées par Dom Gasquet semblent prouver que lord Acton était d’une nature plus soumise que son maître Doellinger.


VIII

Doellinger, lui, s’exacerbait. Son ami Moy, le célèbre canoniste, lui faisait observer qu’il était trop sévère pour la théologie italienne ; Moy parlait en vain. Certaines brisures survenaient entre Doellinger et ses intimes d’autrefois : avec Phillips, taxé d’ultramontanisme fanatique, la rupture était consommée ; l’hospitalité qu’accordèrent au scolastique Schaezler les Feuilles historico-politiques refroidit à jamais les rapports entre Doellinger et Joerg, qui dirigeait cette revue.

De ces deux puissances hostiles, Rome et Doellinger, que volontiers Doellinger eût mises sur un pied d’égalité, la plus conciliante encore était Rome. « On vous y aime beaucoup, quoi