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LA POLITIQUE CANADIENNE
D’ÉMIGRATION FRANÇAISE

De tous les problèmes qui se posent en ce moment à la politique canadienne, le plus épineux est celui de l’émigration. Cet immense pays, presque aussi grand que l’Europe et peuplé seulement de cinq millions d’habitans (une Europe où il n’y aurait en tout et pour tout que la population de deux villes de Paris) a fait signe à grands gestes, de tous côtés, à l’Est comme à l’Ouest, aux foules d’émigrans, pour remplir ses solitudes, évidemment appelées à la plus brillante prospérité agricole et industrielle. Les foules accourent de plus en plus denses. Mais les nationaux commencent à résister.

Le 7 septembre dernier, à Vancouver, 600 émeutiers de race blanche ont pillé le quartier chinois et japonais, sur la nouvelle qu’un paquebot chargé d’émigrans nippons venait de partir d’Honolulu pour le Dominion ; et cela un an après la traversée quasi triomphale que l’ambassadeur du Japon, le prince Fushimi, avait faite du Canada, de l’Est à l’Ouest. Les orateurs politiques qui sont venus par la suite à toucher à la question, ont fait frémir cette région d’un profond sentiment de nationalisme canadien. En définitive, sir Wilfrid Laurier, qui cherchait activement à ouvrir à son pays le marché japonais, s’est engagé aussitôt à payer les dommages de l’émeute de Vancouver, et il a dû envoyer, le 24 octobre, à Tokio, l’un de ses collègues les plus actifs du cabinet, M. Rodolphe Lemieux, pour arranger avec la puissante alliée de l’Angleterre la question de l’émigration. Le ministre japonais des Affaires étrangères, le vicomte Hayashi, s’est engagé, par lettre officielle du 23 décembre 1907, à