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et tient encore un atelier à Téhéran, dans l’avenue Almacié. Sous le règne de Mouzaffer-eddin, la jeunesse persane prit librement son essor vers l’Europe. Ceux de l’Azerbaidjan allèrent de préférence en Russie, ceux du Sud aux Indes ; les fils des négo-cians, en relations d’affaires avec l’Autriche, se dirigèrent vers Vienne ; quelques grands seigneurs de Téhéran envoyèrent leurs enfans dans la réactionnaire Allemagne. Ceux qui aspiraient aux honneurs partagèrent prudemment leur progéniture entre l’Angleterre et la Russie. De beaucoup le plus grand nombre gagna les contrées de langue française, Belgique, Suisse, Constantinople et même Beyrouth. Dans ces dernières années on comptait, en dehors du pays, près de 600 étudians persans. A de rares exceptions, où qu’ils aient été élevés, tous savent notre langue ; à Téhéran et à Tauris, il y a même des moudjteheds qui la parlent ; après le français, la langue la plus répandue est assurément le russe, puis l’anglais, surtout dans le Sud ; il a peu d’expansion dans le Nord, où réside la force vive de l’Iran.

En 1898, le besoin d’emprunter et la nécessité de fournir une garantie aux prêteurs, obligea le gouvernement persan à former une administration régulière de ses douanes. Jusqu’alors, elles avaient été affermées et les fermiers disposaient à leur gré des tarifs, afin d’attirer sur leur domaine le passage de la clientèle. Un sous-directeur au ministère belge des Finances, M. Naus, vint, avec un groupe d’employés de sa nationalité, organiser les douanes persanes. Son action s’étendit rapidement ; il se chargea d’exécuter les décisions du Conseil sanitaire, prit les Postes, envahit les finances et tenta même d’instituer un service de Trésorerie, confié à la Caisse impériale. Les Belges ouvrirent plusieurs écoles spéciales, s’installèrent à la Monnaie, dans les administrations des Ponts et Chaussées et de l’Agriculture, et envisagèrent la réforme successive des divers services publics. L’administration des Télégraphes fut constituée par les Persans eux-mêmes. On ne saurait assez reconnaître le mérite de la besogne accomplie par les Belges ; en fait, ils furent les premiers à faire pénétrer en Perse les méthodes européennes et à y créer un corps efficace de fonctionnaires. Comme langue administrative, ils utilisèrent leur langue, qui est la nôtre et qui jouissait déjà en Perse d’une prépondérance incontestée.

D’ailleurs, les Persans ne s’étaient point contentés d’importer dans leurs écoles et leurs administrations la culture occidentale.