Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 44.djvu/841

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

père de Lucchesi, par laquelle il reconnaissait que Mme la duchesse de Berry et sa fille avaient été débarquées à Palerme en parfaite santé.

Ainsi finit cette affaire qui dure depuis quatorze mois, et qui a irrité les esprits, qui est peu connue des masses en raison des récits et conjectures contradictoires qui ont été débités à dessein et accrédités par les ayans cause afin de cacher la vérité qui n’est plus obscure pour moi.

La duchesse de Berry conserve toujours dans ses propos un espoir de retour en France avec lequel elle récompense ceux qui lui témoignent de l’intérêt. Elle a donné vingt jours de solde à l’équipage de l’Agathe, ce qui fait environ deux mille cinq cents francs. Elle a été fort gracieuse avec les officiers quand ils ont pris congé d’elle.

Elle a dit et fait dire que plus tard, quand elle serait en France, elle récompenserait dignement l’état-major et l’équipage de la corvette. Dans tout ceci elle s’est montrée reconnaissante, car il n’est pas possible de mieux faire les choses que Turpin : il a su y mettre les égards et les attentions que mérite le malheur, tout en conservant les convenances de sa position.

C’est ainsi qu’il a refusé de dîner avec la duchesse parce qu’il a su qu’elle n’inviterait pas le général Bugeaud, et il l’accablait de prévenances, de politesses les plus recherchées. Ne croyez pas que ma vieille amitié pour Turpin m’ait aveuglé. S’il en était autrement, je le dirais de même. J’aime mes amis, mais je ne suis ni aveugle, ni muet sur leurs fautes et leurs défauts.

D’ailleurs là, je fais presque de l’histoire, je dois donc être avant tout véridique, et vous savez que je le fus toujours.

Encore une anecdote. Peu de jours après le départ de Blaye, la casquette du général Bugeaud tomba à la mer. La duchesse lui dit : « Général, si on rapportait votre casquette à Mme Bugeaud, elle vous croirait noyé.

— Bah ! répondit le général, cela ne fait rien madame, une veuve trouve toujours de beaux garçons pour la consoler.

Il est presque certain que la duchesse se rendra sous peu à Prague.

On assure que c’est à cette condition que MM. de Mesnard et de Bauffremont ont consenti à l’accompagner. On veut en imposer au parti et voilà tout ; car on a saisi à travers les propos