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ne distinguait que lentement, dans cette blancheur, la jonchée des marbres et les affleuremens de calcaire, d’où naissait l’illusion. Le Parthénon offrait une identique apparence neigeuse. D’abord, il paraissait tout blanc, puis, quand on y fixait ses yeux, il se fonçait des mêmes reflets bleuâtres que la terre. Des bandelettes vermeilles glissaient le long des colonnes, et tout l’édifice resplendissait comme une lourde châsse chryséléphantine. Par derrière, l’Hymette était un amoncellement de bluets…

Le bel après-midi d’été ! Quel air de joie on respirait dans cet enclos paisible, où le cri furieux des dures blancheurs caniculaires s’éteignait sous la symphonie suave des bleus et des mauves ! Pas un arbre ! Rien que des nuances et des lignes, de pures formes rayonnantes ! Et cette neige illusoire, sous l’ardent soleil, mettait la volupté de l’ombre et de la fraîcheur parmi les pierres arides.

Le premier saisissement passé, on s’oriente, on cherche où poser son regard parmi toutes les beautés qui le sollicitent. On n’ose encore s’approcher du Parthénon. On se rejette sur l’Erechteion, et l’on rôde autour du portique oriental, dont les cinq colonnes ioniques ont excité maints enthousiasmes littéraires et même d’esthétiques amours.

On les a comparées à des jeunes filles, à des fleurs à longues tiges. Toutes ces comparaisons sont justes, mais aucune ne saurait rendre les fines broderies de marbre qui enserrent les gorgerins, à la façon d’un collier et qui ajoutent à tant de perfections on ne sait quel charme de coquetterie féminine.

Sans nul doute, cette partie du monument est tout à fait hors de pair. L’avouerai-je ? J’ai été moins enchanté de l’ensemble. C’est exigu, en somme, — et très compliqué. Pour un édifice aussi restreint, il y a quatre portiques, dont on s’explique mal la destination. Celui des Caryatides est, au premier abord, absolument énigmatique. Les guides nous avertissent qu’il servait à masquer un escalier, et cette excuse nous chagrine. Habitués que nous sommes à proclamer la probité absolue de l’art grec, nous admettons à regret l’emploi de ce trompe-l’œil. Il faut d’ailleurs s’empresser de reconnaître que l’Erechteion est moins un temple qu’une, juxtaposition de chapelles. Chacune avait son entrée particulière, leur niveau même est différent. N’empêche ! ces petites chambres accolées dérangent nos idées latines sur l’unité du plan, et cet agencement un peu laborieux de la