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par le soleil, palpitans de vibrations lumineuses et comme nimbés d’un halo de nacre, revivaient vraiment d’une vie familière et divine. Ici, il suffirait qu’un artiste, — un sculpteur, — s’en donnât la peine pour transformer ce chantier de démolitions qu’est l’Acropole en une magnifique terrasse peuplée de formes harmonieuses. Les Hellènes, si respectueux de tout ce qui touche à leur passé, se garderaient bien d’en rien gâter. Il n’y aurait qu’à surveiller un peu les Anglais et les Américains pour préserver ces reliques de toute dégradation sacrilège.

Aujourd’hui, quand on pénètre dans ce logis aveugle avec ses planches et ses vitrines encombrées de cailloux poudreux, on a d’abord l’impression d’entrer dans un musée géologique.

Et puis, on s’habitue au milieu, à l’atmosphère épaisse d’archéologie, — et c’est un plaisir de rencontrer là une Grèce archaïque, plus réaliste et plus vivante que la Grèce classique du Ve siècle. Oh ! cela n’est pas précisément transportant ! Il y a même des morceaux qui sont franchement hideux, comme ce fronton, encrassé de couleur, qui représente le Typhon à trois têtes. Mais il y a aussi des fragmens de cimaise provenant de l’Hékatompédon, où se déroulent des lotus peints en rouge, des aigles et des cigognes volantes. Si ces primitives enluminures sont d’une naïveté un peu farouche, elles nous renseignent au moins sur le goût décoratif des Athéniens du VIe siècle. Il est probable que ces rudes figures signifiaient pour eux de la beauté.

On peut en dire autant du lot de poupées qui garnissent toute une salle du fond. Leurs robes d’une complication puérile, d’une mignardise quasi barbare, avec leurs applications de broderie et leur plissage artificiel, sont peut-être des documens authentiques pour le costume d’alors. Leurs yeux japonais, leurs lèvres retroussées par un sourire conventionnel, leurs cheveux tressés et divisés en une foule de petites nattes, selon la mode espagnole du temps de Philippe IV, — tout cela compose-t-il une physionomie locale ? On voudrait le croire, sans en être très sûr. Ce qu’il y a de. certain, c’est que ces Korès, — comme on les appelle doctement, — se rapprochent beaucoup du type marseillais populaire. En tout cas, elles nous changent complètement du type classique, — qui, d’ailleurs, devait être singulièrement idéalisé.

De celui-ci il ne reste à l’Acropole qu’un nombre fort restreint de spécimens. Sauf quelques torses désorbités de leur ensemble,