l’Europe : l’affaire des Danois du Sleswig, et il avait été entendu que le souverain lui-même et son ministre adresseraient à notre ambassadeur à Pétersbourg, le général Fleury, qui brûlait de se distinguer par un haut fait diplomatique, l’un une lettre confidentielle, l’autre une dépêche officielle dans le même sens. La lettre confidentielle disait : «… Vos dernières dépêches me prouvent que vous aviez bien compris la nécessité d’une grande réserve ; j’ai attendu sans inconvénient que le nouveau ministère soit formé polir vous répéter ce que déjà La Tour d’Auvergne vous a écrit. N’oubliez pas que ce que vous dites à l’Empereur ou à Gortchakof, est répété à Berlin. Quant à la question du Sleswig, il faut n’en plus parler, comme vous le comprenez vous-même ; mais, si l’on amène de nouveau la conversation sur ce sujet, il faut bien faire comprendre que, si je désire l’exécution fidèle de l’article 5 du traité de Prague, c’est dans le but unique de faire disparaître une cause d’irritation qui pourrait un jour créer des embarras. C’est donc aux puissances qui désirent la paix à chercher à aplanir les difficultés et à effacer les souvenirs irritans ; ce n’est point un service que j’ai demandé à l’empereur Alexandre, je n’ai fait qu’appeler son attention sur une question qu’il est de son intérêt de voir définitivement résolue… (5 janvier). »
La dépêche officielle de Daru donnait des instructions conformes : « Le Cabinet actuel est arrivé au pouvoir avec l’intention de suivre au dehors une politique de paix et de concorde, et d’éviter toute parole ou toute démarche qui tendrait à susciter gratuitement des difficultés entre les gouvernemens. Or, en insistant davantage auprès de la Cour de Russie, sur l’affaire du Sleswig, nous risquerions, je le crains, de nous écarter beaucoup de ce plan de conduite, sans qu’aucune nécessité nous le commande (6 janvier). » Fleury parut adhérer à ces instructions : « Averti par le prince de La Tour d’Auvergne des susceptibilités très vives éveillées à Berlin, et informé par la presse européenne du bruit qui s’était fait à la seule pensée d’une immixtion de la France dans les affaires du Danemark, je m’étais imposé le devoir de n’en plus parler avant d’avoir reçu de nouvelles instructions. Votre Excellence voudra bien reconnaître que la situation reste entière et correcte. Elle est d’accord avec les instructions qu’elle m’adresse aujourd’hui ; et je n’ai qu’à persévérer dans la ligne de conduite que moi-même je m’étais