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la suppression de la liberté commerciale, la création de l’impôt en travail (dont la Commission admettait le principe), les complaisances de l’État envers les compagnies concessionnaires. Il attaque avec une vigueur extrême la fondation du Domaine de la Couronne.

Le R. P. Vermeersch, sous une forme moins acerbe, adresse aussi de nombreux reproches à l’Etat indépendant : en ce qui concerne les franchises commerciales stipulées à Berlin, il se contente d’exposer les faits. Il s’intéresse peu aux griefs des puissances européennes, car « elles ont bec et ongles pour se défendre, et telle fut parfois leur politique qu’on pourrait peut-être, avec quelque raison, les prier de porter d’abord leur attention sur la poutre qu’ils ont dans l’œil. » En revanche, il blâme vivement le système fiscal établi en 1891, et signale tous les abus qui en ont découlé. Il conclut en demandant « que le Congo reste une œuvre belge, mais aussi une œuvre qui soit digne des Belges. »

L’ouvrage de M. Cattier avait paru depuis peu, la Question congolaise du R. P. Vermeersch venait de paraître et, entre ces deux publications, une interpellation de M. Vandervelde au sujet des devoirs qui incombent à la Belgique comme puissance signataire de l’Acte de Berlin, avait provoqué de violens débats à la Chambre quand on apprit que la Commission chargée d’examiner le fameux rapport avait remis ses conclusions entre les mains du Roi (avril 1906). Deux mois plus tard, le Bulletin Officiel de l’Etat publia une série de documens importans, parmi lesquels un décret de réformes renfermant de nombreuses clauses favorables aux indigènes et qui, si elles sont appliquées, modifieront heureusement leur sort : ainsi l’Etat ne leur accordait naguère que l’utilisation des étroites bandes de terre où ils habitent et qu’ils cultivent. Désormais, le gouverneur général ou le commissaire du district pourront attribuer à chaque village une superficie de terre, triple de l’étendue habitée ou cultivée par les noirs. Les indigènes sont autorisés à chasser dans les terres et les forêts domaniales, à pêcher dans les fleuves, rivières, lacs et étangs, en observant les lois et décrets très sévères qui réglementent cette matière (la chasse à l’éléphant reste interdite, bien que ces pachydermes causent souvent de terribles ravages dans les cultures). Citons encore les garanties prises pour que le nombre d’heures de travail