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LA
POLITIQUE EXTÉRIEURE
APRÈS LE PLÉBISCITE


I

Henri IV admettait les guerres de diversion. « Mes desseins, disait-il à Sully, sont de faire voir une guerre étrangère pour occuper en icelle tant de corps et d’esprits ocieux et turbulens qui sont dans mon royaume. » Malgré cette autorité, j’ai toujours pensé que la guerre n’était pas un bon moyen de mater les turbulences intérieures. Contre elles la force seule est efficace, et on affaiblit celle dont on peut disposer quand on en transporte une portion dehors : la guerre la mieux préparée est parfois traversée par la fortune, on peut être vaincu ; alors les sectaires de la haine, auxquels toute abnégation patriotique est inconnue, se ruent sur vous et vous poignardent dans le dos. Néanmoins, avant le plébiscite, lorsque l’Empire semblait « usé, fini, pourri, honni, exécré, agonisant, » on pouvait lui supposer l’arrière-pensée de chercher dans une aventure glorieuse le moyen de sortir d’une situation intérieure perdue. Après le plébiscite, lorsque cet Empereur honni, exécré, agonisant, venait d’obtenir un nombre de suffrages égal à celui de son intronisation, et que la persistance de sa force populaire était indéniable, personne ne pouvait plus honnêtement prêter à un souverain fatigué, vieux avant l’âge, la folle pensée de remettre en jeu la sécurité qui venait de lui être assurée et de la risquer dans les hasards d’une