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Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 45.djvu/749

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par l’Angleterre, même après que la Reine l’a supplié de maintenir la paix en Europe, il se décide à prendre les armes. L’entêtement et la maladresse du gouvernement autrichien, la mauvaise administration des États italiens ne lui fournissent que trop d’occasions de partir en guerre. Jusqu’au dernier moment, la Reine fait tous ses efforts auprès des deux parties pour prévenir le conflit. Avec la clarté habituelle de son esprit, elle résume la situation dans une lettre adressée au roi des Belges : « Bien qu’à l’origine ce soit la criminelle folie de la Russie et de la France qui ait été cause de cette crise terrible, c’est la stupidité et l’aveuglement de l’Autriche qui ont amené la guerre maintenant. » Qu’est devenu le cantique entonné si souvent autrefois en l’honneur de l’alliance française ? Il suffit que la France soit soupçonnée d’un rapprochement avec la Russie, quoiqu’on n’en puisse donner aucune preuve positive, pour que l’opinion publique en Angleterre se retourne contre nous et que la Reine elle-même fasse chorus avec son peuple et rejette sur nous la responsabilité de la guerre. Dans les documens officiels qui doivent être soumis au Parlement, elle demande avec insistance qu’on ne se contente pas de blâmer l’Autriche et la Sardaigne, comme si elles avaient seules engagé la partie, mais que, sans rien dire de blessant pour la France, on indique qu’elle aussi a sa part dans les événemens qui troublent l’Europe. M. de Persigny essaie de défendre son maître en niant qu’on ait pris des engagemens envers la Russie, en disant qu’à l’origine l’Empereur ne voulait pas la guerre, mais que M. de Cavour l’a menacé de publier sa correspondance confidentielle et l’a ainsi forcé à prendre les armes. Cette explication même laisse planer une équivoque fâcheuse sur l’attitude de l’Empereur. Qu’est-ce que cette correspondance confidentielle, sinon la preuve qu’il entretenait des relations intimes avec les meneurs de la politique italienne ? A la Cour d’Angleterre, la confiance des premiers temps n’existe plus et ne reviendra pas. Si la Reine revenait sur le portrait qu’elle a tracé autrefois de Napoléon III, elle serait amenée à y faire de singulières retouches, et à reconnaître sans doute que la naïveté n’était pas, comme elle le croyait, un des traits de son caractère.

Dans l’esprit de la Reine, à la confiance succède un sentiment d’abord vague et indéterminé, puis de plus en plus précis, l’inquiétude. Quelles sont, chez l’Empereur, les idées de derrière