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richement sculptés. Sur leur base à quatre carres se détachent des Dieux, des adorans, et les éternels lions de Mahavira. Enfin, à Sittamour, comme à Genji, se montrent les chapiteaux en T, à pendans ciselés, du caractère assyrien. Les chéneaux avec leurs corniches curvilignes y possèdent, de même, leurs encoignures arquées, sculptées, et sur lesquelles bondit le petit lion symbolique, perché à l’extrême sommet de l’angle.

Le mandapam qui court à droite de l’entrée du sanctuaire a été fortement remanié, tels ceux de Genji, mais pour d’autres causes. On a muré sa face principale et constitué ainsi une galerie close qui se continue avec un bâtiment dont les fenêtres à croisillons sont encadrées de sculptures peintes. Une pareille décoration égayé les pilastres. Le bleu, le jaune et le rouge alternent par teintes plates. Le dôme, magnifiquement sculpté et rehausse de couleurs vives, fourmille de figures humaines, de génies, de bêtes. Pyramidal à sa base, il s’arrondit en coupole réticulée, denticulée, terminée par un gros solide arrondi qui se surmonte d’un bouton piriforme, assis lui-même sur un disque.

A droite, encore, règne un second mandapam. Celui-là est placé près du porche. Les piliers en sont neufs et de la main des fournisseurs habituels. Les bons tailleurs de pierre se recrutent toujours à Tanjore et à Madura. Ils ont ciselé sur les fûts leur habituel cortège de divinités pouraniques. Mais, pour honnête qu’en soit la facture, les formes crient la décadence. Quel contraste avec les admirables sculptures des piliers du dehors ! Ils furent enlevés de la merveilleuse pagode aux mille colonnes de Genji. La congrégation djaïna les acheta vers 1875 avec le kiosque monumental et les éléphans qui y sont attelés. Je les retrouve au dehors, tels qu’ils furent décrits par Esquer, lors de sa visite à Genji, en 1864 : « Un fort beau char en pierre auquel sont attelés deux éléphans d’un travail remarquable ; les trompes de ces animaux sont engagées dans le mur d’enceinte de la ville, qui a été probablement construit postérieurement à la pagode. » Et cette pagode est celle où le rajah Desing pria une dernière fois Vichnou avant de marcher à la mort.

Malgré le soleil de midi qui brûle, je relève et je mesure le char de Genji. Qui se souciera de cette œuvre, vieille peut-être de cinq siècles, miraculeusement sauvée par ces bons djaïnas de Sittamour ? Ceux qui accablent de railleries faciles les collectionneurs, oublient trop qu’en art, les conservatoires verbaux